Le blog du Temps de l'Immaculée.
23/12/2024
23/12/2024
O Emmanuel ! Roi de Paix ! Vous entrez aujourdâhui dans JĂ©rusalem, la ville de votre choix ; car câest lĂ que vous avez votre Temple. BientĂŽt vous y aurez votre Croix et votre SĂ©pulcre ; et le jour viendra oĂč vous Ă©tablirez auprĂšs dâelle votre redoutable tribunal. Maintenant, vous pĂ©nĂ©trez sans bruit et sans Ă©clat dans cette ville de David et de Salomon. Elle nâest que le lieu de votre passage, pour vous rendre Ă BethlĂ©hem. Toutefois, Marie votre mĂšre, et Joseph son Ă©poux, ne la traversent pas sans monter au Temple, pour y rendre au Seigneur leurs vĆux et leurs hommages : et alors sâaccomplit, pour la premiĂšre fois, lâoracle du ProphĂšte AggĂ©e qui avait annoncĂ© que la gloire du second Temple serait plus grande que celle du premier. Ce Temple, en effet, se trouve en ce moment possĂ©der une Arche dâAlliance bien autrement prĂ©cieuse que celle de MoĂŻse, mais surtout incomparable Ă tout autre sanctuaire quâau ciel mĂȘme, parla dignitĂ© de Celui quâelle contient. Câest le LĂ©gislateur lui-mĂȘme qui est ici, et non plus simplement la table de pierre sur laquelle la Loi est gravĂ©e. Mais bientĂŽt lâArche vivante du Seigneur descend les degrĂ©s du Temple, et se dispose Ă partir pour BethlĂ©hem, oĂč lâappellent dâautres oracles. Nous adorons, ĂŽ Emmanuel ! Tous vos pas Ă travers ce monde, et nous admirons avec quelle fidĂ©litĂ© vous observez ce qui a Ă©tĂ© Ă©crit de vous, afin que rien ne manque aux caractĂšres dont vous devez ĂȘtre douĂ©, ĂŽ Messie, pour ĂȘtre reconnu par votre peuple. Mais souvenez-vous que lâheure est prĂšs de sonner, que toutes choses se prĂ©parent pour votre NativitĂ©, et venez nous sauver ; venez, afin dâĂȘtre appelĂ© non plus seulement Emmanuel, mais JĂ©sus, câest-Ă -dire Sauveur.
O Jérusalem ! ville du grand Dieu, lÚve les yeux autour de toi, et regarde ton Seigneur ; car il va bientÎt venir te délivrer de tes liens.
22/12/2024
22/12/2024
O Roi des nations ! Vous approchez toujours plus de cette BethlĂ©hem oĂč vous devez naĂźtre. Le voyage tire Ă son terme, et votre auguste MĂšre, quâun si doux fardeau console et fortifie, va sans cesse conversant avec vous par le chemin. Elle adore votre divine majestĂ©, elle remercie votre misĂ©ricorde ; elle se rĂ©jouit dâavoir Ă©tĂ© choisie pour le sublime ministĂšre de servir de MĂšre Ă un Dieu. Elle dĂ©sire et elle apprĂ©hende tout Ă la fois le moment oĂč enfin ses yeux vous contempleront. Comment pourra-t-elle vous rendre les services dignes de votre souveraine grandeur, elle qui sâestime la derniĂšre des crĂ©atures ? Comment osera-t-elle vous Ă©lever dans ses bras, vous presser contre son cĆur, vous allaiter Ă son sein mortel ?
Et pourtant, quand elle vient Ă songer que lâheure approche oĂč, sans cesser dâĂȘtre son fils, vous sortirez dâelle et rĂ©clamerez tous les soins de sa tendresse, son cĆur dĂ©faille et lâamour maternel se confondant avec lâamour quâelle a pour son Dieu, elle est au moment dâexpirer dans cette lutte trop inĂ©gale de la faible nature humaine contre les plus fortes et les plus puissantes de toutes les affections rĂ©unies dans un mĂȘme cĆur. Mais vous la soutenez, ĂŽ DĂ©sirĂ© des nations !
Car vous voulez quâelle arrive Ă ce terme bienheureux qui doit donner Ă la terre son Sauveur, et aux hommes la Pierre angulaire qui les rĂ©unira dans une seule famille. Soyez bĂ©ni dans les merveilles de votre puissance et de votre bontĂ©, ĂŽ divin Roi ! et venez bientĂŽt nous sauver, vous souvenant que lâhomme vous est cher, puisque vous lâavez pĂ©tri de vos mains. Oh ! Venez, car votre Ćuvre est dĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e ; elle est tombĂ©e dans la perdition ; la mort lâa envahie : reprenez-la dans vos mains puissantes, refaites-la ; sauvez-la ; car vous lâaimez toujours, et vous ne rougissez pas de votre ouvrage.
21/12/2024
Divin Soleil, ĂŽ JĂ©sus ! Vous venez nous arracher Ă la nuit Ă©ternelle : soyez Ă jamais bĂ©ni ! Mais combien vous exercez notre foi, avant de luire Ă nos yeux dans toute votre splendeur ! Combien vous aimez Ă voiler vos rayons, jusquâĂ lâinstant marquĂ© par votre PĂšre cĂ©leste, oĂč vous devez Ă©panouir tous vos feux ! Voici que vous traversez la JudĂ©e ; vous approchez de JĂ©rusalem ; le voyage de Marie et de Joseph tire Ă son terme. Sur le chemin, vous rencontrez une multitude dâhommes qui marchent en toutes les directions, et qui se rendent chacun dans sa ville dâorigine, pour satisfaire Ă lâĂdit du dĂ©nombrement. De tous ces hommes, aucun ne vous a soupçonnĂ© si prĂšs de lui, ĂŽ divin Orient ! Marie, votre MĂšre, est estimĂ©e par eux une femme vulgaire ; tout au plus, sâils remarquent la majestĂ© et lâincomparable modestie de cette auguste Reine, sentiront-ils vaguement le contraste frappant entre une si souveraine dignitĂ© et une condition si humble ; encore ont-ils bientĂŽt oubliĂ© cette heureuse rencontre. Sâils voient avec tant dâindiffĂ©rence la mĂšre, le fils non encore enfantĂ© Ă la lumiĂšre visible, lui donneront-ils une pensĂ©e ? Et cependant ce fils, câest vous-mĂȘme, ĂŽ Soleil de justice ! Augmentez en nous la Foi, mais accroissez aussi lâamour. Si ces hommes vous aimaient, ĂŽ libĂ©rateur du genre humain, vous vous feriez sentir Ă eux ; leurs yeux ne vous verraient pas encore, mais du moins leur cĆur serait ardent dans leur poitrine, ils vous dĂ©sireraient, et ils hĂąteraient votre arrivĂ©e par leurs vĆux et leurs soupirs. O JĂ©sus qui traversez ainsi ce monde que vous avez fait, et qui ne forcez point lâhommage de vos crĂ©atures, nous voulons vous accompagner dans le restĂ© de votre voyage ; nous baisons sur la terre les traces bĂ©nies des pas de celle qui vous porte en son sein ; nous ne voulons point vous quitter jusquâĂ ce que nous soyons arrivĂ©s avec vous Ă lâheureuse BethlĂ©hem, Ă cette Maison du Pain, oĂč enfin nos yeux vous verront, ĂŽ Splendeur Ă©ternelle, notre Seigneur et notre Dieu !
21/12/2024
20/12/2024
20/12/2024
O Fils de David, hĂ©ritier de son trĂŽne et de sa puissance, vous parcourez, dans votre marche triomphale, une terre soumise autrefois Ă votre aĂŻeul, aujourdâhui asservie par les Gentils. Vous reconnaissez de toutes parts, sur la route, tant de lieux tĂ©moins des merveilles de la justice et de la misĂ©ricorde de JĂ©hovah votre PĂšre envers son peuple, au temps de cette ancienne Alliance qui tire Ă sa fin. BientĂŽt, le nuage virginal qui vous couvre Ă©tant ĂŽtĂ©, vous entreprendrez de nouveaux voyages sur cette mĂȘme terre ; vous y passerez en faisant le bien, et guĂ©rissant toute langueur et toute infirmitĂ©, et cependant nâayant pas oĂč reposer votre tĂȘte. Du moins, aujourdâhui, le sein maternel vous offre encore un asile doux et tranquille, oĂč vous ne recevez que les tĂ©moignages de lâamour le plus tendre et le plus respectueux. Mais, ĂŽ Seigneur ! il vous faut sortir de cette heureuse retraite ; il vous faut, LumiĂšre Ă©ternelle, luire au milieu des tĂ©nĂšbres ; car le captif que vous ĂȘtes venu dĂ©livrer languit dans sa prison. Il sâest assis dans lâombre de la mort, et il y va pĂ©rir, si vous ne venez promptement en ouvrir les portes avec votre Clef toute-puissante ! Ce captif, ĂŽ JĂ©sus, câest le genre humain, esclave de ses erreurs et de ses vices : venez briser le joug qui lâaccable et le dĂ©grade ; ce captif, câest notre cĆur trop souvent asservi Ă des penchants quâil dĂ©savoue : venez, ĂŽ divin LibĂ©rateur, affranchir tout ce que vous avez daignĂ© faire libre par votre grĂące, et relever en nous la dignitĂ© de vos frĂšres.
19/12/2024
Te souviens-tu de ce rude pĂšlerinage en solitaire Ă Chartres (1) :
« Dans tes intentions de priĂšre revenait sans cesse le sort de ce âdissidentâ russe chrĂ©tien dont tu avais lu rĂ©cemment les conditions atroces de dĂ©tention au goulag. Ă travers lui, tu pensais Ă tous les martyrs du monstrueux communisme. Que valait ta peine et tes douleurs du moment par rapport Ă leurs souffrances indĂ©finies ? Câest pour lui et pour eux notamment que tu offrais Ă Dieu ce petit sacrifice dâune nuit. »
Ce dissident sâappelait Alexandre Ogorodnikov. Il fut enfermĂ© dans les camps de concentration de lâarchipel du goulag pendant neuf ans, jusquâen fĂ©vrier 1987. Il fut libĂ©rĂ© grĂące Ă une intervention de Ronald Reagan et de Margaret Thatcher auprĂšs de Gorbatchev. De mĂ©moire, câest juste lâannĂ©e prĂ©cĂ©dente que tu avais fait ce raid. Peut-ĂȘtre ton sacrifice avait-il Ă©tĂ© une goutte dâeau dans un ocĂ©an souterrain de priĂšres permettant sa libĂ©ration ? Mais dans ce mystĂšre possible de la communion des saints, il y a peut-ĂȘtre aussi davantage encore.
Bien des annĂ©es aprĂšs, tu dĂ©couvrais avec Ă©motion la figure peu commune de celui pour qui tu avais marchĂ©. CâĂ©tait dans le livre de Rod Dreher : RĂ©sister au mensonge, vivre en chrĂ©tiens dissidents (ArtĂšge, 2021). Explication. Autrefois leader respectĂ© des jeunesses soviĂ©tiques, dĂ©sabusĂ© par le communisme, Alexandre Ogorodnikov se convertit Ă lâorthodoxie chrĂ©tienne et fonde un sĂ©minaire chrĂ©tien clandestin : « Ces sĂ©minaires Ă©taient comme un feu de joie oĂč venaient se rĂ©chauffer les cĆurs orthodoxes gelĂ©s. » il ne tardera pas Ă ĂȘtre emprisonnĂ© jusque dans le camp de la mort âPerm 36â. Il raconte Ă Dreher qui lâa rencontrĂ© Ă Moscou :
« Quand on mâa mis dans ma cellule, jâai saluĂ© les autres en leur disant : âLa paix soit avec vous !â Lâun dâeux mâa demandĂ© si jâĂ©tais chrĂ©tien, Ă quoi jâai rĂ©pondu oui. Il mâa demandĂ© de le prouver. Un autre dĂ©tenu Ă renchĂ©ri : âNous sommes la lie de lâhumanitĂ©. Nous nâavons pas de cigarettes. Si Dieu nous en donne, nous voudrons bien croire en lui.â »
Ogorodnokov rĂ©pond que le corps est le temple de lâEsprit et que fumer fait du tort, mais que Dieu les aimait tellement que, dâaprĂšs lui, Il serait prĂȘt Ă leur accorder des cigarettes en signe de sa misĂ©ricorde. Et il leur demande de se lever pour prier ensemble. Ses codĂ©tenus ont ri dâabord, mais ils se sont tus respectueusement lorsquâil a entamĂ© sa priĂšre.
« Nous Ă©tions trĂšs nombreux dans cette cellule, mais le silence est alors tombĂ©. Nous avons priĂ© pendant quinze minutes, puis je leur ai dit que la priĂšre Ă©tait terminĂ©e et quâils pouvaient se rasseoir. Ă ce moment prĂ©cis, les gardes ont ouvert la porte de la cellule et y ont jetĂ© un paquet de cigarettes (âŠ). CâĂ©tait le signe pour lequel jâavais priĂ©. Les prisonniers se sont mis Ă crier : â Dieu existe ! Il existe !â Et câest Ă ce moment-lĂ que jâai compris que Dieu sâadressait Ă moi aussi. Il me disait quâil avait une mission pour moi dans cette prison. »
De fait, bien quâelles ne lâaient pas condamnĂ© Ă mort mais ĂŽ combien brisĂ©, frappĂ© et torturĂ© (il en a gardĂ© une paralysie partielle du visage), les autoritĂ©s pĂ©nitentiaires dĂ©cident de lui donner une leçon en le plaçant dans le couloir de la mort :
« Quand je suis entrĂ© dans la cellule, jâai regardĂ© ceux qui Ă©taient lĂ et leur ai dit : âĂcoutez-moi, mes frĂšres, jâai Ă©tĂ© envoyĂ© ici pour vous aider Ă aller Ă la rencontre de la mort, non comme des criminels, mais comme des hommes dotĂ©s dâune Ăąme qui sâen vont rencontrer leur crĂ©ateur, Dieu le PĂšre.â Comme les exĂ©cutions par fusillade avaient lieu tĂŽt le matin, nombre de prisonniers ne trouvaient pas le sommeil. Ils attendaient quâon frappe Ă la porte pour voir qui serait appelĂ©. Impossible de fermer lâĆil, Ă©videmment. Je ne dormais pas non plus. Je tĂąchais de les aider Ă transformer cette nuit de terreur en nuit dâespĂ©rance. »
Face Ă ces criminels endurcis, le jeune Alexandre (qui nâa pas trente ans) leur dit que, bien quâil ne soit pas prĂȘtre, il est disposĂ© Ă entendre leur confession. Il ne pourra les absoudre, mais quand il mourra lui-mĂȘme et se retrouvera devant le Seigneur, il pourra tĂ©moigner de leur repentir : « Je leur disais que Dieu est misĂ©ricordieux, et que le seul fait de reconnaĂźtre leurs fautes et de renoncer au pĂ©chĂ© les laverait et les purifierait. Ils finiraient tous par ĂȘtre fusillĂ©s tĂŽt ou tard ; au moins mourraient-ils la conscience tranquille. »
Mais comme le confinement avec les condamnĂ©s Ă mort nâa donc toujours pas conduit Ogorodnikov au repentir de son opposition Ă lâathĂ©isme de lâĂtat soviĂ©tique, le systĂšme carcĂ©ral le met alors Ă lâisolement :
« Une nuit que jâĂ©tais seul dans la petite piĂšce, jâai trĂšs clairement senti quelquâun me rĂ©veiller, doucement mais fermement. Quand jâai ouvert les yeux, jâai reçu une vision dâune grande clartĂ©. Je pouvais voir le couloir de la prison. Je pouvais voir un homme Ă qui lâon retirait ses chaĂźnes, et bien que je ne lâaie vu que de derriĂšre, je savais exactement de qui il sâagissait. Je compris que Dieu avait envoyĂ© un ange pour me rĂ©veiller afin que je puisse accompagner cet homme par la priĂšre alors quâon lâemmenait au peloton dâexĂ©cution. âQui suis-je pour que tu me montres cela ?â ai-je demandĂ© Ă Dieu. Puis je sus que je voyais toute lâĂ©tendue de lâamour de Dieu. Que nos priĂšres et les miennes et celles de ce prisonnier, avaient Ă©tĂ© entendues, et quâil Ă©tait pardonnĂ©. JâĂ©tais en larmes. Je me suis rĂ©veillĂ© plusieurs fois de la sorte, pas pour tous les prisonniers, mais pour un certain nombre dâentre eux. »
Câest dans une autre prison, oĂč il est aussi seul, quâAlexandre comprendra pourquoi le visage des condamnĂ©s ne lui Ă©tait jamais montrĂ©. Une nuit le vieux garde entre dans sa cellule, lâair visiblement agitĂ©, dĂ©lirant : « Ils viennent la nuit », lui dit-il. Ogorodnikov lâencourage Ă se confier. Et voici ce que lui rĂ©vĂšle son geĂŽlier :
« Quand jâĂ©tais plus jeune et que je travaillais dans une autre prison, nous avons sorti une vingtaine ou une trentaine de prĂȘtres de leur cellule et nous les avons rassemblĂ©s Ă lâextĂ©rieur. Nous les avons attelĂ©s Ă un traĂźneau, et ils ont dĂ» le tirer jusque dans la forĂȘt. Toute la journĂ©e ils ont couru, jusquâĂ atteindre des marais. LĂ , ils ont Ă©tĂ© placĂ©s en deux rangĂ©es, lâune derriĂšre lâautre. Nous formions un pĂ©rimĂštre autour des prisonniers. JâĂ©tais lâun des gardes. Un des membres du KGB sâest approchĂ© du premier prĂȘtre et lui a demandĂ© trĂšs calmement dâune voix douce : âY a-t-il un Dieu ?â Le prĂȘtre a dit oui. Il lui a tirĂ© une balle dans le front de sorte que sa cervelle Ă©clabousse le prĂȘtre qui se tenait juste derriĂšre. Il a patiemment chargĂ© son pistolet, sâest placĂ© devant le prĂȘtre suivant et a demandĂ© : âDieu existe-t-il ?ââ âOui il existe.â Et lâhomme lâa abattu de la mĂȘme maniĂšre que le premier. Nous ne leur avons pas bandĂ© les yeux. Ils ont vu exactement ce qui allait leur arriver. »
Devant Rod Dreher, Alexandre Ogorodnokov (alors septuagĂ©naire) a du mal Ă refouler ses larmes en racontant cet ancien tĂ©moignage. Dâune voix brisĂ©e par lâĂ©motion, il conclut en martelant : « Aucun de ces prĂȘtres nâa reniĂ© le Christ ! » Les nuits du vieux gardien Ă©taient hantĂ©es par le souvenir de ces visages de prĂȘtres. Voici pourquoi, selon Alexandre, ses visions mystiques ne lui montraient pas la face des condamnĂ©s : lâhorreur lâaurait fait sombrer dans lâobsession lui aussi ! Sa mission, son ministĂšre consistaient, avec la grĂące de Dieu, Ă accompagner spirituellement dans leur dos de pauvres Ăąmes au paradis comme un discret ange gardien, une bouĂ©e de sauvetage.
Splendeur de la communion des saints : ce « marchĂ© » fraternel et solidaire dâĂ©change spirituel gratuit, fondĂ© sur la rĂ©versibilitĂ© des mĂ©rites! Bouleversant la communautĂ© humaine du pĂ©chĂ© originel. Nous sommes tous redevables quelque part de lâacte de charitĂ©, jamais perdu ni perdant, dâun prochain ou lointain, inconnu ou connu, vivant ou dĂ©funt, dans lâ « Ă©conomie » collective du salut. « On ne se sauve pas tout seul. Nul ne retourne seul Ă la maison du PĂšre. Lâun donne la main Ă lâautre. Le pĂ©cheur tient la main du saint et le saint tient la main de JĂ©sus » (PĂ©guy). Câest aussi ce quâon appelle le « nexus mysteriorum », ce lien intime des mystĂšres qui signifie que les mystĂšres sont connectĂ©s entre eux comme les baptisĂ©s dans le Corps mystique du Christ, comme lâEglise militante (sur terre) lâest Ă lâĂglise souffrante (au Purgatoire) et triomphante (au Ciel) dans une circulation de sĂšve surnaturelle.
AprĂšs sa libĂ©ration, Ogorodnokov a continuĂ© de lutter pour la libertĂ© religieuse en Union soviĂ©tique (qui est devenue un fait en 1990). Il a fondĂ© le premier parti dĂ©mocrate chrĂ©tien, la premiĂšre Ă©cole libre, la premiĂšre soupe populaire pour les pauvres et le premier refuge privĂ© pour orphelins et mĂšres adolescentes. Mais le prix Ă payer de cet apostolat en URSS fut aussi lâassassinat dâun certain nombre de ses associĂ©s, y compris son frĂšre et son secrĂ©taire. Lui-mĂȘme a survĂ©cu Ă une tentative dâassassinat. Un film-documentaire et un livre ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s sur sa vie (Dissident pour la vie par KĆnraad De Wolf). Quand Rod Dreher lâa rencontrĂ© Ă Moscou il y a quelques annĂ©es, il continuait dâagir pour les autres selon sa foi chrĂ©tienne. ImpressionnĂ© par sa stature de dissident de la fin de lâĂšre soviĂ©tique, comparable Ă celle de SoljĂ©nitsyne auparavant, Dreher commente :
« Quand nous agissons, soit en acceptant notre propre souffrance, soit en partageant celle des autres, nous devons la laisser agir en nous et nous transformer comme elle a transformĂ© les martyrs du communisme. Elle peut nous rendre amers, attiser la colĂšre ou lâesprit de vengeance, ou elle peut ĂȘtre semblable au feu du fondeur (Ma 3, 2), comme elle le fut pour SoljĂ©nitsyne et Calciu, pour KrcmĂ©ry, Ogorodnikov et tant dâautres, purifiant notre amour pour Dieu et pour lâhumanitĂ© souffrante⊠»
Oui, de part et dâautre de lâan 2000 (du 20Ăšme au 21Ăšme siĂšcle), il y a bien â face au double totalitarisme de la raison sourde au divin (athĂ©isme) et de la religion sourde Ă la raison (islamisme) â un ĆcumĂ©nisme du sang des martyrs chrĂ©tiens, comme lâaffirmait saint Jean-Paul II. Et aussi un ĆcumĂ©nisme de la communion des saints qui franchit sans problĂšme les frontiĂšres. Entre ton petit pĂšlerinage de deux jours Ă Chartres et lâimmense parcours et offrande dâAlexandre Ogorodnikov, on ne peut savoir quel retentissement invisible, quel « effet papillon » surnaturel, ont nos gestes et nos priĂšres, nos jeĂ»nes et nos sacrifices dans lâimmense toile spirituelle et palpitante de tous les orants de lâĂglise militante, souffrante et triomphante. Mais, mĂȘme si cela reste un prodigieux et profond mystĂšre, nous avons ici comme une illustration possible et sensible de ce dogme de la communion des saints (et des pĂ©cheurs). Par lequel nos bonnes actions offertes dans telle intention peuvent rĂ©sonner solidairement sur les Ăąmes souffrantes de la planĂšte ou du Purgatoire, en union avec les mĂ©rites de lâunique sacrifice du Christ, de Marie et de tous les saints. NâhĂ©sitons pas Ă souffrir joyeusement par amour du prochain et de Dieu, pour notre conversion, celle des pauvres pĂ©cheurs, la compassion et le soutien des Ăąmes qui en ont besoin : « aimer jusquâĂ en avoir mal », comme dit MĂšre Teresa, Ă lâhumble imitation de notre Seigneur et FrĂšre JĂ©sus-Christ.
Hermine (Rémi Fontaine)
(1) « Quelles choses font la joie (scoute) parfaite » dans Parole de Scout, éditions Sainte-Madeleine, 2007, p. 138.
19/12/2024
19/12/2024
Vous voici donc en marche, ĂŽ Fils de JessĂ©, vers la ville de vos aĂŻeux. LâArche du Seigneur sâest levĂ©e et sâavance, avec le Seigneur qui est en elle, vers le lieu de son repos. « Quâils sont beaux vos pas, ĂŽ Fille du Roi, dans lâĂ©clat de votre chaussure » , lorsque vous venez apporter leur salut aux villes de Juda ! Les Anges vous escortent, votre fidĂšle Ăpoux vous environne de toute sa tendresse, le ciel se complaĂźt en vous, et la terre tressaille sous lâheureux poids de son CrĂ©ateur et de son auguste Reine. Avancez, ĂŽ MĂšre de Dieu et des hommes, Propitiatoire tout-puissant oĂč est contenue la divine Manne qui garde lâhomme de la mort ! Nos cĆurs vous suivent, vous accompagnent, et, comme votre Royal ancĂȘtre , nous jurons « de ne point entrer dans notre maison, de ne point monter sur notre couche, de ne point clore nos paupiĂšres, de ne point donner le repos Ă nos tempes, jusquâĂ ce que nous ayons trouvĂ© dans nos cĆurs une demeure pour le Seigneur que vous portez, une tente pour le Dieu de Jacob. » Venez donc, ainsi voilĂ© sous les flancs trĂšs purs de lâArche sacrĂ©e, ĂŽ rejeton de JessĂ©, jusquâĂ ce que vous en sortiez pour briller aux yeux des peuples, comme un Ă©tendard de victoire. Alors les rois vaincus se tairont devant vous, et les nations vous adresseront leurs vĆux. HĂątez-vous, ĂŽ Messie ! Venez vaincre tous nos ennemis, et dĂ©livrez-nous.
18/12/2024
Lâantienne
O Seigneur suprĂȘme ! AdonaĂŻ ! Venez nous racheter, non plus dans votre puissance, mais dans votre humilitĂ©. Autrefois vous vous manifestĂątes Ă MoĂŻse, votre serviteur, au milieu dâune flamme divine ; vous donnĂątes la Loi Ă votre peuple du sein des foudres et des Ă©clairs : maintenant il ne sâagit plus dâeffrayer, mais de sauver. Câest pourquoi votre trĂšs pure MĂšre Marie ayant connu, ainsi que son Ă©poux Joseph, lâĂdit de lâEmpereur qui va les obliger dâentreprendre le voyage de BethlĂ©hem, sâoccupe des prĂ©paratifs de votre heureuse naissance. Elle apprĂȘte pour vous, divin Soleil, les humbles langes qui couvriront votre nuditĂ©, et vous garantiront de la froidure dans ce monde que vous avez fait, Ă lâheure oĂč vous paraĂźtrez, au sein de la nuit et du silence. Câest ainsi que vous nous dĂ©livrerez de la servitude de notre orgueil, et que votre bras se fera sentir plus puissant, alors quâil semblera plus faible et plus immobile aux yeux des hommes. Tout est prĂȘt, ĂŽ JĂ©sus ! Vos langes vous attendent : partez donc bientĂŽt et venez en BethlĂ©hem, nous racheter des mains de notre ennemi.
17/12/2024
Transcription:
Orienter la sociĂ©tĂ© vers la culture de vie, ce nâest pas seulement empĂȘcher lâavortement et lâeuthanasie par la loi. Car la vĂ©ritable cause de la culture de mort est plus profonde : câest la dĂ©pression morale de la sociĂ©tĂ©. La culture de mort est le fruit de lâathĂ©isme et du matĂ©rialisme. Câest la volontĂ© de puissance dĂ©sespĂ©rĂ©e. Orienter la sociĂ©tĂ© vers la culture de vie, câest dâabord rendre Ă la sociĂ©tĂ© sa vitalitĂ© : la joie et la fiertĂ© dâexister. Câest faire sortir la sociĂ©tĂ© de la dĂ©pression morale.
Il faut agir Ă trois niveaux, par ordre dâimportance
Au niveau militant, politique, et religieux.
1-Combattre les artisans de la culture de mort
Il faut combattre. Nous le savons tous dans cette salle. Nous sommes tous ici des combattants. Merci Ă Lola et au Political Network for Values de nous rassembler Ă Madrid. Câest une joie dâĂȘtre ensemble.
Nous devons combattre le lobby de la culture de mort Ă tous les niveaux, dans toutes les institutions. Dans les parlements, dans les tribunaux, Ă lâONU, etc.
Combattre la culture de mort, ce nâest pas seulement combattre le Planning Familial et les fondations Ford, Rokefeller, Soros, Gates et Buffet. Il faut aussi combattre ceux qui veulent avilir la vie, ceux qui veulent rendre la vie laide et triste : ceux qui promeuvent le dĂ©sespoir, la drogue, la prostitution, la pornographie, et la mauvaise Ă©ducation sexuelle. Or, ce sont ces mĂȘmes fondations qui promeuvent aussi lâavortement et lâeuthanasie.
Ce combat pour la vie, nous le menons dans les institutions, Ă GenĂšve, Strasbourg, New York, Bruxelles, Washington, San JosĂ© et ailleurs ; nous menons ce combat comme des soldats sur un champ de bataille. Mais cela ne suffit pas, nous devons voir plus loin, nous devons aussi nous engager pour que la sociĂ©tĂ© soit de nouveau conquise par la culture de vie. Câest le deuxiĂšme niveau dâaction, vĂ©ritablement politique.
2-Action au niveau politique: il faut aimer la vie et croire en son destin
Les peuples europĂ©ens nâont plus dâenfants parce quâils ont perdu le goĂ»t de la vie et ne croient plus en leur avenir, en leur destin.
Le vrai problĂšme est que les peuples europĂ©ens sont devenus dĂ©pressifs; câest cela le problĂšme principal : ils ne croient plus en leur avenir. Trop dâeuropĂ©ens sont rĂ©signĂ©s au suicide dĂ©mographique et au remplacement par lâimmigration.
La culture de vie, aujourdâhui exige de renverser cette dĂ©pression terrible. Il faut rendre aux peuples europĂ©ens le goĂ»t de la vie et la vision de leur avenir.
Je vois deux conditions pour cela :
Il faut dâabord aimer la vie, et il faut croire en son destin.
Aimer la vie. Cela paraßt évident, mais il y a un travail énorme à faire, en particulier avec la jeunesse qui a grandi dans une culture sinistre. Il faut dire et répéter que la vie est magnifique, et que le monde est splendide. Il faut cultiver la vie, la culture et la joie.
La seconde condition pour lutter contre la dépression des peuples européens, est de croire en notre avenir, en notre destin.
Un peuple qui a honte de son passĂ© et qui ne croit plus en son destin est dĂ©jĂ sorti de lâhistoire.
Ă lâinverse, les « migrants » qui traversent lâAfrique et la MĂ©diterranĂ©e au risque de leur vie ont une force immense, car ils doivent doit lutter pour vivre et croire en leur destin. Parmi eux, les musulmans immigrĂ©s en Europe savent pourquoi ils ont des enfants: ils croient que leur avenir est de conquĂ©rir lâEurope. MĂȘme sâils sont pauvres, ils savent pourquoi avoir des enfants.
Il en est de mĂȘme du peuple juif qui survit et traverse toutes les Ă©preuves parce quâil croit en son destin, et il sait pourquoi avoir des enfants.
Câest dans la dynamique dâun destin collectif, familial, professionnel et national que les personnes deviennent fĂ©condes, quâelles parviennent Ă lâexcellence. Il faut cette dynamique vitale.
Pour cela, il faut des chefs politiques capables de donner le goût de la vie et la vision du destin national.
Le PrĂ©sident français Emmanuel Macron, comme dâautres dirigeants europĂ©ens, nâa pas dâenfants, et il ne croit pas que la France, ni mĂȘme lâEurope, puissent encore avoir un destin qui leur soit propre. Il a renoncĂ© au destin national, et lâa Ă©changĂ© contre une illusion de futur mondial. Mais câest une illusion. Les dirigeants tels que Macron nâont pas compris quâils sont les seuls Ă faire ce rĂȘve mondialiste. Les autres peuples ne veulent pas se dissoudre dans lâathĂ©isme absurde de la mondialisation occidentale, ils ne veulent pas disparaĂźtre. Ils croient encore en leur raison dâĂȘtre. Ils nâont pas honte de leur histoire.
Ă lâopposĂ© dâEmmanuel Macron, il y a Donald Trump: il incarne la vitalitĂ© amĂ©ricaine. Il aime la vie avec puissance, et câest pour cela quâil la dĂ©fend. Lâautre force de Donald Trump, câest quâil a Ă©tĂ© capable de rendre aux AmĂ©ricains leur propre destin. Il les a convaincus et entrainĂ©s dans la dynamique de Make America Great Again (rendre Ă lâAmĂ©rique sa grandeur).
Avoir ces deux forces est essentiel, mais cela ne suffit toujours pas, car lâhomme a besoin de se dĂ©passer lui-mĂȘme, de se transcender. Et ce serait une erreur que de lâoublier. La patrie est trop Ă©troite pour lâhomme.
3- Câest le troisiĂšme niveau dâaction : le niveau de la transcendance
Les communistes, les socialistes et les nĂ©olibĂ©raux ont compris la force de cet idĂ©al dâautodĂ©passement, mais ils lâont orientĂ© contre la personne, la famille, la nation et lâEglise, pour en «libĂ©rer» lâhomme. Ce dĂ©passement est prĂ©sentĂ© comme un progrĂšs, mais il est surtout une destruction de la condition humaine.
Nous voyons aujourdâhui le rĂ©sultat de cette «libĂ©ration»: elle dĂ©truit lâhomme.
Lâautre autodĂ©passement de lâhomme qui est proposĂ© Ă prĂ©sent, câest le rĂȘve scientiste et transhumaniste. Mais câest aussi une illusion.
Les rĂȘves dâautodĂ©passement communiste et scientiste ont en commun le rejet de Dieu et sont des alternatives dĂ©sastreuses Ă la religion.
Câest parce que le peuple sâest dĂ©tournĂ© de la religion quâil a adhĂ©rĂ© Ă ces idĂ©ologies de substitution, et câest pour cette raison aussi quâil est devenu dĂ©pressif. Car un peuple athĂ©e qui rejette son passĂ© et refuse son destin mĂšne une existence absurde.
Une fois encore, regardons le peuple juif.
Le peuple juif survit et traverse toutes les Ă©preuves non seulement parce quâil aime la vie et croit en son destin, mais surtout parce quâil sait que son destin est liĂ© Ă sa fidĂ©litĂ© Ă son alliance avec Dieu.
Les ChrĂ©tiens aussi ont une Alliance avec Dieu; les peuples europĂ©ens ont Ă©tĂ© baptisĂ©s et sanctifiĂ©s par des saints innombrables. Câest cette Alliance avec Dieu â qui est source de toute vie â qui est la Vie â quâil faut rĂ©nover.
La dĂ©fense de la culture de vie exige de lutter contre lâathĂ©isme criminel, et de rendre Ă la sociĂ©tĂ© lâamour de la vie, la confiance en son destin et la respiration de son Ăąme.
Je vous remercie.
17/12/2024
Et toujours plus pressante, retentit la promesse : « Voyez, tout est accompli », et finalement : « Sachez aujourd'hui que le Seigneur vient, et demain vous le verrez dans sa gloire ». Lors de la veillĂ©e, quand scintille l'arbre de lumiĂšre et que s'Ă©changent les cadeaux, le dĂ©sir inassouvi d'une autre lumiĂšre monte en nous, jusqu'Ă ce que sonnent les cloches de la messe de minuit et que se renouvelle, sur des autels parĂ©s de cierges et de fleurs, le miracle de NoĂ«l. Et le Verbe s'est chair. Nous voilĂ parvenus Ă l'instant bienheureux oĂč notre attente est comblĂ©e. »
( Le mystÚre de Noël , conférence de sainte Edith Stein, Janvier 1931)
17/12/2024
Ce chant de Noël n'est pas un chant de Noël. C'est un hymne pour la période de l'Avent, une période liturgique qui va bien au-delà de la simple préparation de Noël.
Durant ces quatre courtes semaines, lâĂglise sâest historiquement concentrĂ©e sur Notre Seigneur JĂ©sus-Christ comme lâaccomplissement de toutes les prophĂ©ties et de tous les dĂ©sirs humains, alors quâelle anticipe non seulement la cĂ©lĂ©bration de son incarnation Ă NoĂ«l, mais aussi alors quâelle attend avec espoir son retour glorieux Ă la fin des temps.
Les versets de « O viens, ĂŽ viens, Emmanuel » sont tirĂ©s de sept antiennes anciennes que l'Ăglise utilisait dans sa liturgie de priĂšre du soir depuis bien avant le IXe siĂšcle. Chaque annĂ©e, du 17 au 23 dĂ©cembre, la liturgie de l'Ăglise entre dans une prĂ©paration plus intense et plus proche de la venue du Christ Ă NoĂ«l. Ce changement est perceptible dans les lectures de la messe ces jours-lĂ , mais aussi dans la liturgie des heures de l'Ăglise, en particulier lors de la priĂšre du soir. Chaque soir pendant cette semaine, l'Ăglise prie l'une de ce que l'on appelle les grandes « antiennes O » avant de rĂ©citer le cantique « Magnificat » de Notre-Dame.
Les Antiennes O invoquent Notre Seigneur en utilisant des images tirées de l'Ancien Testament : « à Sagesse d'en haut » ; « à Seigneur de la maison d'Israël » ; « à Racine du tronc de Jessé » ; « à Clé de David » ; « à Aurore radieuse » ; « à Roi des Nations » ; « à Emmanuel ». à ces images bibliques s'ajoutent diverses supplications telles que : « Viens nous enseigner le chemin de la connaissance ! » ; « Viens nous sauver sans tarder ! » ; « Viens libérer les prisonniers des ténÚbres ! »
Chacune de ces antiennes est une belle priĂšre en elle-mĂȘme, mais chacune dĂ©montre aussi exactement comment l'Ăglise en est venue Ă comprendre la relation du Christ avec les promesses et les images de Dieu si rĂ©pandues dans l'Ancien Testament.
« Ă Sagesse dâen haut ! »
IsaĂŻe a prophĂ©tisĂ© quâun rameau sortirait de la souche de JessĂ©. Lâun des hĂ©ritiers de JessĂ© serait une figure messianique et un rĂ©dempteur pour IsraĂ«l.
« LâEsprit du Seigneur reposera sur lui : esprit de sagesse et dâintelligence » (Is 11, 1-2). Parce que les prophĂ©ties dâIsaĂŻe attendent avec tant dâespoir la rĂ©demption dâIsraĂ«l et du monde entier dans les grandes promesses de Dieu, il est particuliĂšrement le prophĂšte du temps de lâAvent.
Mais le Christ est plus que lâOint. Saint Paul a dit Ă lâĂglise de Corinthe que « le Christ est la puissance de Dieu et la sagesse de Dieu » (1 Co 1, 24). Le Christ est la Sagesse dont parle le livre des Proverbes comme Ă©tant lâartisan et le plaisir de Dieu (Proverbes 8). Le Fils Ă©ternel est toujours le plaisir du PĂšre et lâArtisan par lequel toutes choses ont Ă©tĂ© faites.
Lâantienne du 18 dĂ©cembre : « Seigneur de la maison dâIsraĂ«l, qui a donnĂ© la Loi Ă MoĂŻse sur le SinaĂŻ » est peut-ĂȘtre un exemple plus poignant dâune puissante image du divin dans lâAncien Testament. Les Ă©vĂ©nements relatĂ©s dans le livre de lâExode sont dâune grandeur magnifique, du buisson ardent Ă la sĂ©paration de la mer Rouge, en passant par la remise de la Loi Ă MoĂŻse sur un mont SinaĂŻ couvert de tonnerre et dâĂ©clairs.
Les PĂšres de lâĂglise ont rĂ©guliĂšrement notĂ© la prĂ©sence du Christ dans les diverses manifestations de Dieu aux IsraĂ©lites. Saint Justin le martyr rappelait : « Celui-lĂ mĂȘme qui est Ă la fois ange et Dieu, Seigneur et homme, et qui apparut sous forme humaine Ă Abraham et Ă Isaac, apparut aussi dans une flamme de feu sortant du buisson et conversa avec MoĂŻse. »
Saint GrĂ©goire de Nysse commente les Ă©vĂ©nements du dĂ©sert â les nuages, le tonnerre et le tabernacle de la prĂ©sence de Dieu â : « Prenant comme exemple ce que dit Paul, qui a partiellement dĂ©voilĂ© le mystĂšre de ces choses, nous disons que MoĂŻse fut auparavant instruit par un type du mystĂšre du tabernacle qui entoure l'univers. » Ce tabernacle, le Christ, le Fils de Dieu, poursuit-il, « est en quelque sorte Ă la fois informe et façonnĂ©, incréé dans la prĂ©existence mais créé en ayant reçu cette composition matĂ©rielle. »
Le Fils Ăternel de Dieu prĂ©existant qui est lâimage parfaite de Dieu est aussi la prĂ©sence de Dieu dans le buisson ardent, sur le mont SinaĂŻ et parfaitement dans son incarnation.
Il nâest donc pas surprenant que la version latine de cette antienne commence par « O AdonaĂŻ », empruntant le mot hĂ©breu que les Juifs craignant Dieu utilisent lorsquâils lisent la Torah pour Ă©viter de prononcer le nom propre de Dieu lui-mĂȘme â câest le nom Seigneur, le nom que saint Paul dit aux Philippiens a donnĂ© au Christ parce quâil nâa pas considĂ©rĂ© lâĂ©galitĂ© avec Dieu comme quelque chose Ă saisir, mais sâest plutĂŽt vidĂ© lui-mĂȘme jusquâĂ la mort (cf. Philippiens 2:6-11). JĂ©sus-Christ est AdonaĂŻ. Il est Kyrios. Il est le Seigneur.
Enfin, d'autres antiennes O identifient le Christ comme l'accomplissement de la grandeur d'Israël et du désir humain. Il est l'Oriens, l'aurore dont Isaïe a promis qu'elle se lÚverait sur le peuple élu de Dieu (Isaïe 60, 1-2). Il est aussi la Racine de Jessé. Il n'est donc pas seulement l'accomplissement mais le début de la lignée israélite.
Il est le Créateur et celui par qui la lignée de David est née. Le Christ est donc à la fois le début et la fin de la promesse faite à David. Il est l'Alpha et l'Oméga. Il est celui dont l'Ancien Testament prédit qu'il régnera comme roi sur toutes les nations.
Les Antiennes O sont bien plus que de simples refrains à chanter avant le Magnificat de Notre-Dame ou à servir de versets dans un hymne de l'Avent. Elles révÚlent les mystÚres du Christ déjà révélés dans la puissance et la gloire de Dieu dans l'Ancien Testament.
Saint Thomas dâAquin avait raison dâinsister sur le fait que de nombreux grands prophĂštes dâIsraĂ«l avaient une connaissance prophĂ©tique rĂ©elle et explicite de JĂ©sus et de ses mystĂšres, mĂȘme sâils vivaient des centaines dâannĂ©es avant lâIncarnation. « Abraham se rĂ©jouit de ce quâil verrait mon jour », a prĂȘchĂ© JĂ©sus lui-mĂȘme un jour. « Il lâa vu et il sâest rĂ©joui » (Jn 8, 56). Le Christ est actif en IsraĂ«l. Il est prĂ©sent dans lâAncien Testament.
Ces grandes antiennes nous rappellent que lâAvent ne se rĂ©sume pas Ă la prĂ©paration de NoĂ«l. Elles nous rappellent que le Christ est le point central de lâhistoire du salut et, en fait, de toute lâhistoire du monde, parce quâil est Emmanuel â « Dieu avec nous ».
La sagesse de Dieu est telle que le Seigneur nous a créés pour ĂȘtre en relation avec lui afin dâapporter la lumiĂšre non seulement Ă notre vie mais au monde. Chaque annĂ©e, lâĂglise nous offre ces quatre semaines pour que nous nous souvenions intensĂ©ment de ce que nous devons vivre chaque jour : dans la prĂ©paration, lâanticipation et la joyeuse espĂ©rance que le Seigneur viendra Ă nous et nous sauvera.
Ă Emmanuel, notre Roi et Donateur de la Loi : Viens nous sauver, Seigneur notre Dieu !
PĂšre Thomas Petri, OP
Catholic World Report (USA)
17/12/2024