Le blog du Temps de l'Immaculée.
16/06/2025
Ce mardi, une alerte a retenti dans les mĂ©dias du monde entier : « URGENT â IsraĂ«l/Iran : Donald Trump appelle la population Ă Ă©vacuer TĂ©hĂ©ran immĂ©diatement ». Si cette dĂ©claration de lâancien prĂ©sident amĂ©ricain, en marge du sommet du G7 au Canada, ne constitue pas une annonce officielle, elle tĂ©moigne dâun niveau de tension sans prĂ©cĂ©dent dans le conflit qui oppose lâĂtat dâIsraĂ«l Ă la RĂ©publique islamique dâIran. Bombardements sur des bases militaires, drones abattus, menaces ouvertes : lâaffrontement semble franchir un seuil critique. Et de plus en plus de voix sâĂ©lĂšvent pour souligner une dimension bien plus profonde, presque mystique, de cette guerre.
Dans certains milieux religieux et stratĂ©giques, les Ă©vĂ©nements actuels sont perçus Ă la lumiĂšre des prophĂ©ties bibliques, en particulier celles contenues dans les chapitres 38 et 39 du livre du prophĂšte ĂzĂ©chiel. Ce dernier Ă©voque lâarrivĂ©e dâun mystĂ©rieux ennemi, Gog, prince du pays de Magog, venant attaquer IsraĂ«l restaurĂ© sur sa terre. Le texte dit : « Fils dâhomme, tourne ta face vers Gog, au pays de Magog, prince de Rosh, de MĂ©shekh et de Tubal, et prophĂ©tise contre lui. Tu diras : Ainsi parle le Seigneur YahvĂ© : Me voici contre toi, Gog [âŠ] Je te ferai sortir, toi et toute ton armĂ©e [âŠ] Avec eux, la Perse, Kush et Pouth, tous avec boucliers et casques » (ĂzĂ©chiel 38, 2â5). La mention explicite de la Perse , ancienne dĂ©nomination de lâIran â,frappe les esprits. Ce pays ferait partie dâune coalition ennemie montant une attaque contre les montagnes dâIsraĂ«l.
La prophĂ©tie se poursuit ainsi : « Tu viendras dans un pays restaurĂ© aprĂšs le glaive, rassemblĂ© dâentre une multitude de peuples [âŠ] Tu monteras, tu viendras comme lâouragan, tu seras comme un nuage pour couvrir le pays, toi, toutes tes troupes, et des peuples nombreux avec toi » (ĂzĂ©chiel 38, 8â9). Enfin, Dieu annonce quâil interviendra Lui-mĂȘme pour sauver IsraĂ«l : « Je briserai ton arc dans ta main gauche et ferai tomber tes flĂšches de ta main droite. Tu tomberas sur les montagnes dâIsraĂ«l, toi et toutes tes troupes » (ĂzĂ©chiel 39, 3â4).
De nombreux croyants, notamment dans les milieux Ă©vangĂ©liques aux Ătats-Unis ou au sein du sionisme religieux, considĂšrent ces passages comme une annonce des temps prĂ©sents. Le retour des Juifs sur leur terre, lâhostilitĂ© dâune alliance venue du nord comprenant la Perse, la guerre totale⊠Les Ă©lĂ©ments leur semblent correspondre. Certains rabbins parlent ouvertement dâune possible rĂ©alisation de la guerre de Gog et Magog, prĂ©lude au salut messianique dâIsraĂ«l.
En Iran aussi, la guerre est investie dâun sens religieux. Le rĂ©gime chiite duodĂ©cimain attend le retour du Mahdi, lâimam cachĂ©, dont la venue doit mettre fin Ă lâinjustice sur terre. Dans cette perspective, les affrontements avec IsraĂ«l prennent un caractĂšre eschatologique : la RĂ©publique islamique se voit parfois comme lâinstrument divin chargĂ© de prĂ©cipiter la chute du rĂ©gime sioniste, perçu comme une entitĂ© illĂ©gitime et impie. Les discours officiels mĂȘlent politique et thĂ©ologie, appelant les fidĂšles Ă se prĂ©parer Ă un affrontement global.
IsraĂ«l, de son cĂŽtĂ©, bien que dirigĂ© par un gouvernement laĂŻc, voit croĂźtre lâinfluence des religieux nationalistes. Pour ces derniers, la guerre contre lâIran nâest pas seulement dĂ©fensive : elle sâinscrit dans un processus spirituel, une Ă©tape vers la rĂ©demption promise par les prophĂštes. LâidĂ©e que lâhistoire biblique sâaccomplit Ă travers les Ă©vĂ©nements actuels gagne du terrain.On ne saurait rĂ©duire ce conflit Ă une seule grille de lecture spirituelle. Les enjeux gĂ©opolitiques, nuclĂ©aires, Ă©nergĂ©tiques et stratĂ©giques sont Ă©videmment majeurs. Mais la montĂ©e en puissance des discours religieux, de part et dâautre, rend le conflit plus opaque, plus dangereux. Une guerre oĂč lâon croit agir au nom de Dieu devient une guerre sans retour.
Alors que le ciel du Moyen-Orient sâassombrit, un verset rĂ©sonne avec force : « Tu viendras comme un nuage pour couvrir le pays⊠» Et nombreux sont ceux, croyants ou non, qui sâinterrogent : la guerre dâĂzĂ©chiel est-elle en train de sâĂ©crire sous nos yeux ?
Mathilde de Virene dans Tribune Chrétienne
15/06/2025
[âŠ] Le point de vue qui est le mien est celui dâun observateur, de surcroĂźt non-catholique. Câest peut-ĂȘtre cette position de retrait qui me permet de dire que la rĂ©union de tant de personnes, pour la plupart des jeunes, rassemblĂ©es sous le slogan de « Pour quâIl rĂšgne, sur la terre comme au ciel », est un signe puissant que le courant « traditionaliste » tĂ©moigne, plutĂŽt quâil ne sâoppose.
Alors quâil est confrontĂ© Ă des mesures restrictives de plus en plus frĂ©quentes qui limitent lâusage du rite tridentin (pour quel objectif final ? le faire disparaĂźtre ?), certes avec des situations diffĂ©rentes selon les diocĂšses, nâest-il pas paradoxal que certains dans lâĂglise prennent le risque de se priver des forces vives que constituent les communautĂ©s quâon appelait « Ecclesia Dei », auxquelles Jean-Paul II avait accordĂ© une largesse certaine dans lâusage du rite ancien ?
Quelles sont ces forces vives ? Les enfants et adolescents des Ă©coles catholiques, des mouvements de scoutisme catholique, les fidĂšles des paroisses, qui Ă©taient Ă Chartres. Les vocations qui en sortiront. Les familles qui existent ou se constitueront. LâenquĂȘte « IdentitĂ©, pratiques et perception du catholicisme en France », rĂ©alisĂ©e par lâIfop pour lâObservatoire français du catholicisme (OFC), montre lâampleur de la sĂ©cularisation de la sociĂ©tĂ© française.
Cependant, JĂ©rĂŽme Fourquet ajoute Ă cette constatation un commentaire qui change tout : le nombre record des baptĂȘmes dâadolescents et dâadultes montre que nous sommes passĂ©s
« dâun catholicisme de conformisme social et dâhĂ©ritage, majoritaire, Ă un catholicisme qui est minoritaire dans la sociĂ©tĂ© française mais qui procĂšde de plus en plus dâune affirmation et dâun choix ».
En raison, prĂ©cisĂ©ment, de ce mouvement dâaffirmation, est-il possible que lâĂglise prenne le risque de voir le fossĂ© se creuser entre elle et les adeptes du rite ancien ? Pense-t-elle que ceux-ci finiront par, comme certains le font dĂ©jĂ , passer indiffĂ©remment dâun rite Ă lâautre, selon lâendroit oĂč ils vivent, la disponibilitĂ© du rite ancien et la lassitude des restrictions ? Certains se satisferont sans doute du nouveau rite (Novus Ordo) en latin, messe dite le dos au peuple. Pas tous, pas la majoritĂ©.
Le risque est donc quâen multipliant les restrictions au rite ancien, un fossĂ© se creuse entre lâĂglise et des fidĂšles dynamiques, nombreux, qui se sentent brimĂ©s. Les organisateurs du pĂšlerinage de Chartres le rĂ©affirment dans leur manifeste :
« Oui, nous recevons intĂ©gralement le concile Vatican II et le magistĂšre rĂ©cent de lâĂglise, nous lâĂ©tudions dans nos livrets de formations, nous lâinterprĂ©tons, selon le voeu de BenoĂźt XVI, Ă la lumiĂšre de la Tradition. »
Mais ils ajoutent :
« Nous savons que lâĂglise ne peut modifier, au nom du progrĂšs ou de lâadaptation au monde, la doctrine de JĂ©sus sur les points aussi essentiels que la thĂ©ologie de la messe, la doctrine du sacerdoce, lâindissolubilitĂ© du mariage ou la morale catholique. »
Doctrinalement, les « traditionalistes » sont donc pleinement dans lâĂglise, mais il existe des attitudes quâils ne veulent pas avaliser. Ils les nomment : le relativisme doctrinal et le progressisme moral.
Quâils incarnent une sensibilitĂ© propre est une Ă©vidence, mais câest le relativisme doctrinal qui est une erreur et ce que dit le pape sur les questions morales est-il, au fond, si Ă©loignĂ© de leur position ? Ce fossĂ© qui peut sâagrandir au sein du monde catholique, il est sans doute temps, puisquâun nouveau pape a Ă©tĂ© Ă©lu, de lâĂ©viter par un dialogue sans faux-semblant et un statut clair, au sein de lâĂglise, pour les communautĂ©s traditionnelles.
14/06/2025
Une colonne de foi, dâabord. Tous ces jeunes, et moins jeunes, rĂ©unis dans une mĂȘme marche, confessent une mĂȘme foi. Ils avancent ensemble, portĂ©s par une seule certitude : JĂ©sus-Christ est Seigneur. Pas un slogan, pas une mode, mais une profession de foi jaillie du cĆur, dite et redite Ă chaque pas, Ă chaque Ave, Ă chaque halte, Ă chaque messe. Le Christ est vivant, et câest Lui quâils suivent. Le peuple de Dieu est en marche. LittĂ©ralement. Et ce peuple ne demande rien, sinon de rester fidĂšle Ă Celui qui lâa sauvĂ©.
Une colonne de ferveur, ensuite. Ces marcheurs ne sont pas lĂ pour battre un record. Ils ne cherchent pas la performance ou la reconnaissance. Leur seul objectif est de rendre tĂ©moignage. Trois jours durant, ils prient, ils chantent, ils mĂ©ditent. Ă tout instant, ils peuvent se confesser : des centaines de prĂȘtres sont lĂ , au service de cette immense cathĂ©drale vivante. Ce nâest pas un exploit sportif, câest un acte spirituel. Ils marchent pour les flĂšches de Notre-Dame de Chartres, et au fond, ils marchent pour le Ciel.
Et si cela sâappelle une identitĂ©, alors oui, ils en ont une. Et cette identitĂ©, câest celle du Christ. Qui oserait leur en faire reproche ?
Une colonne dâamour, enfin. Câest peut-ĂȘtre cela qui frappe le plus. LâAmour. LâAmour avec un grand A. Lâamour du Christ, dâabord, manifestĂ© dans les regards, dans le silence des processions, dans la joie pure des chants. Lâamour de la Vierge Marie, surtout. Elle est lĂ , MĂšre et Reine, portĂ©e dans les bras des pĂšlerins, priĂ©e sans cesse, honorĂ©e comme elle le fut dans les siĂšcles passĂ©s.
Ce Gloria chantĂ©, capturĂ© en vidĂ©o, tĂ©moigne Ă lui seul de la vĂ©ritĂ© de ce pĂšlerinage. Il suffit de lâĂ©couter pour comprendre. On nâest pas lĂ pour se chercher soi-mĂȘme. On est lĂ pour rendre gloire Ă Dieu.
Oui, le peuple de Dieu est en marche. Et cette marche ne flĂ©chira pas, car elle est nourrie dâun feu qui ne sâĂ©teint pas : la foi catholique. Si un monde fatiguĂ©, dĂ©racinĂ©, douteux regarde passer cette colonne sans comprendre, quâil sache au moins ceci : ces marcheurs-lĂ sont les porteurs dâune espĂ©rance. Non pas une idĂ©ologie, mais une foi. Non pas une revendication, mais une adoration. Non pas un repli, mais une offrande.
Ils marchent pour Dieu. Et cela suffit.
Philippe Marie
1000RCINFO en partenariat avec Tribune Chrétienne.
13/06/2025
un Ă©vĂȘque de lâEglise clandestine, de cette Eglise qui lutte depuis des dĂ©cennies pour rester fidĂšle Ă Rome malgrĂ© les interdictions du pouvoir communiste, malgrĂ©, mĂȘme, le fameux accord provisoire de 2018 obtenu par François. Mgr Joseph Lin Yuntuan a Ă©tĂ© ainsi promu nouvel Ă©vĂȘque auxiliaire de lâarchidiocĂšse continental de Fuzhou, le 5 juin dernier.
Cerise sur le gĂąteau, il a Ă©tĂ© nommĂ© dâabord par le Saint-SiĂšge et reconnu ensuite par le gouvernement chinois, qui a datĂ© sa prise de charge au 11 juin. Et la surprise est de taille, car selon les conditions de lâaccord, câest le gouvernement chinois qui propose dans un premier temps et le pape qui approuve ou dĂ©sapprouve. De plus, PĂ©kin avait pris la fĂącheuse habitude de ne pas vraiment requĂ©rir lâaval papal, menant son propre jeu pour une Eglise quâil veut avant tout sinisĂ©e, câest-Ă -dire communiste.
Un haut dignitaire religieux local a avouĂ© que cette fois, « le chat avait laissĂ© la souris manger le grain »⊠Serait-ce un effet de la priĂšre remarquĂ©e de LĂ©on XIV, le 26 mai dernier, pour la communion des catholiques chinois « avec lâEglise universelle » ?
La réponse du pape Léon XIV à la Chine communiste
Le Saint-SiĂšge a Ă©tĂ© diplomate : il a attendu lâacceptation par le gouvernement chinois pour faire une publication officielle, mais a bien prĂ©cisĂ©, dans son communiquĂ©, quâil lâavait nommĂ© une semaine auparavant.
« Nous sommes heureux dâapprendre quâaujourdâhui, Ă lâoccasion de la prise de possession de la charge dâĂ©vĂȘque auxiliaire de Fuzhou par Son Excellence Mgr Joseph Lin Yuntuan, son ministĂšre Ă©piscopal est Ă©galement reconnu en droit civil. Cet Ă©vĂ©nement constitue un nouveau fruit du dialogue entre le Saint-SiĂšge et les autoritĂ©s chinoises et une Ă©tape importante dans le cheminement de communion du diocĂšse », a dĂ©clarĂ© Matteo Bruni, directeur de la Salle de presse.
Non seulement le pape a agi indĂ©pendamment de lâEtat communiste, mais il a choisi une figure de lâEglise clandestine qui sâest engagĂ©e de façon notable. FormĂ© au sĂ©minaire du diocĂšse de Fuzhou, Joseph Lin, 73 ans, a exercĂ© les fonctions dâadministrateur apostolique entre 2003 et 2007, puis de nouveau entre 2013 et 2016, avant dâĂȘtre consacrĂ© Ă©vĂȘque en 2017. Il nâavait jamais, jusque-lĂ , Ă©tĂ© reconnu par les autoritĂ©s.
Comme des sources lâont confirmĂ© au mĂ©dia The Pillar, câest lâarchevĂȘque de Fuzhou, Mgr Joseph Cai Bingrui, installĂ© Ă la tĂȘte de lâarchidiocĂšse en janvier, qui, dĂ©sireux de sâadjoindre Mgr Joseph Lin et bien vu des autoritĂ©s, les a persuadĂ©s dâaccepter.
Pékin cÚde ?
Alors, bien sĂ»r, Mgr Lin « a solennellement jurĂ© de respecter la Constitution et les lois du pays, de prĂ©server lâunitĂ© de la patrie et lâharmonie sociale, dâaimer la patrie et lâEglise, dâadhĂ©rer au principe dâEglises indĂ©pendantes et autonomes, de suivre la voie de la sinisation de lâEglise catholique dans notre pays et de contribuer Ă la construction globale dâun pays socialiste modernisĂ© et Ă lâavancement global du grand renouveau de la nation chinoise ». Câest lâinĂ©luctable contrepartie que certains catholiques de lâEglise souterraine se mettent en devoir de refuser.
Câest dâailleurs la raison pour laquelle la direction de cet archidiocĂšse a longtemps Ă©tĂ© un sujet de tension entre lâEglise clandestine et lâappareil dâEtat. A la suite de lâaccord de 2018, une grande partie du clergĂ© local a rĂ©sistĂ© Ă lâadhĂ©sion Ă lâAssociation catholique patriotique chinoise, pur produit du Parti communiste. Et en 2020, lorsque PĂ©kin a fini par reconnaĂźtre celui qui avait Ă©tĂ© nommĂ© archevĂȘque de Fuzhou par BenoĂźt XVI en 2010, Mgr Lin Yuntuan (emprisonnĂ© et condamnĂ© Ă 10 ans de travaux forcĂ©s dans les annĂ©es 1980), certains ont parlĂ© de « trahison ».
Un si long et si difficile combat ne peut ĂȘtre simple. Ce qui est sĂ»r, câest que ce geste de LĂ©on XIV prouve son souci de lâEglise qui est en Chine, et fait se repositionner le Vatican, dont le gouvernement communiste a toujours refusĂ© lâautoritĂ© religieuse.
MĂȘme ces derniĂšres annĂ©es, PĂ©kin avait pris lâhabitude dâannoncer publiquement la nomination et lâinstallation dâĂ©vĂȘques sans la reconnaissance du Vatican et souvent, apparemment, sans lâapprobation papale. Pire, au cours de la pĂ©riode dite « Sede vacante », entre la mort du pape François et lâĂ©lection de LĂ©on XIV, le gouvernement chinois a procĂ©dĂ©, sans sourciller, à « lâĂ©lection » de deux Ă©vĂȘques dans les diocĂšses de Shanghai et Xinxiang : on ne profite pas ainsi dâune si petite fenĂȘtre temporelle sans bonne raison politique. Et mĂȘme si elles Ă©taient prĂ©vues de longue date, les retarder eut Ă©tĂ© un moindre signe de respect diplomatique.
Une nouvelle Ăšre pour lâEglise clandestine qui est en Chine ?
AprĂšs le conclave qui a Ă©lu le pape LĂ©on XIV, le cardinal Pietro Parolin, secrĂ©taire dâEtat du Vatican, a laissĂ© entendre lors dâentretiens que lâinstallation du prĂȘtre Li Janlin comme Ă©vĂȘque du diocĂšse de Xinxiang, avait Ă©tĂ© prĂ©alablement approuvĂ©e par le pape François avant sa mort, rĂ©vĂšle The Pillar. Cependant, aucune dĂ©claration officielle du Vatican, ni aucune reconnaissance nâont jamais Ă©tĂ© faites.
Il pourrait sâagir dâune simple justification a posteriori opĂ©rĂ©e par le principal artisan de lâaccord Vatican-Chine qui a tout intĂ©rĂȘt Ă prouver la bonne conduite de PĂ©kin. Surtout quâil existe dĂ©jĂ un Ă©vĂȘque de Xinxiang reconnu par Rome, Ă savoir Mgr Joseph Zhang Weizhu, nommĂ© par le pape Jean-Paul II en 1991, qui a dirigĂ© le diocĂšse pendant des dĂ©cennies en tant quâĂ©vĂȘque de lâEglise clandestine, et qui se trouve depuis quatre ans en dĂ©tention, Ă la suite dâun raid policier dans un sĂ©minaire clandestin !
Si par ces deux nominations éclairs unilatérales Pékin semble avoir voulu éprouver la partie adverse, Rome a relevé le gant avec intelligence avec cette nomination tactique de Mgr Joseph Lin Yuntuan, la premiÚre de son genre.
On peut mĂȘme se demander si LĂ©on XIV nâa pas assistĂ© Ă la prise de parole de Mgr Zen que raconte le blog Silere Non Possum : lors dâune des congrĂ©gations gĂ©nĂ©rales prĂ©cĂ©dant le conclave, le cardinal aurait Ă©voquĂ©, dans un discours courageux, la situation de lâEglise en Chine, parlant ouvertement de la trahison subie par les fidĂšles chinois fidĂšles au pape, abandonnĂ©s au profit dâaccords diplomatiques avec le rĂ©gime communiste, dĂ©plorant le silence du Saint-SiĂšge face Ă la persĂ©cution des Ă©vĂȘques, des prĂȘtres et des laĂŻcs qui refusent de se plier Ă lâAssociation patriotique contrĂŽlĂ©e par le Parti. Lâavenir nous le dira.
Clémentine Jallais dans RITV
10/06/2025
1. Le SacrĂ©-CĆur : Origines, Ăvolution et Importance Actuelle
Racines Historiques et Diffusion : La dĂ©votion au SacrĂ©-CĆur remonte aux "premiers temps du christianisme" et s'est particuliĂšrement dĂ©veloppĂ©e au XVIIe siĂšcle sous l'impulsion de sainte Marguerite-Marie Alacoque Ă Paray-le-Monial. C'est en juin 1675 que le Christ lui demande de propager cette dĂ©votion.
Reconnaissance EcclĂ©siastique : Les apparitions de Paray-le-Monial sont reconnues en 1765. Le concile Vatican II (1965) a Ă©levĂ© la cĂ©lĂ©bration du SacrĂ©-CĆur au rang des solennitĂ©s, fĂȘtĂ©e "19 jours aprĂšs la PentecĂŽte, un vendredi, le 27 juin cette annĂ©e".
Appel Papal Ă la RedĂ©couverte : La rĂ©cente encyclique du pape François, Dilexit nos (octobre 2024), "invite Ă dĂ©poussiĂ©rer cette ancienne dĂ©votion", y voyant le "cĆur aimant et compatissant de Dieu". Le pape François souligne l'importance du cĆur comme ce qui peut "le mieux signifier lâamour divin du Christ uni pour toujours et insĂ©parablement Ă son amour humain". Il perçoit ce culte comme pouvant faire "beaucoup de bien", agissant comme un "antidote contre des 'maladies trĂšs actuelles' qui frappent le monde et l'Ăglise aujourd'hui".
2. Initiatives Majeures en Europe en Juin 2025
Plusieurs événements majeurs soulignent le nouvel élan de cette dévotion :
ConsĂ©cration de lâIrlande au SacrĂ©-CĆur de JĂ©sus (22 juin) :
InitiĂ©e par la "Croisade du SacrĂ©-CĆur", un groupe de prĂȘtres, religieux et laĂŻcs.
Quatre statues pĂšlerines du SacrĂ©-CĆur, bĂ©nies par le pape François le 8 janvier 2025, parcourent les provinces ecclĂ©siastiques d'Irlande depuis fĂ©vrier.
Ces statues convergeront vers le sanctuaire marial de Knock pour une "grande messe au cours de laquelle lâIrlande sera consacrĂ©e Ă nouveau au SacrĂ©-CĆur de JĂ©sus". La derniĂšre consĂ©cration nationale remonte Ă "plus de 150 ans".
CongrĂšs International "Cor Iesu Spes Mundi" en Espagne (6-8 juin) :
OrganisĂ© Ă Valladolid par lâInstitut du CĆur du Christ et lâarchidiocĂšse.
Le thĂšme, "CĆur de JĂ©sus, espĂ©rance du monde", rĂ©pond aux paroles du pape François dans la bulle d'indiction au JubilĂ© : "LâespĂ©rance naĂźt de lâamour et se fonde sur lâamour qui jaillit du CĆur de JĂ©sus transpercĂ© sur la croix" (Spes non confundit, 3).
Le congrĂšs vise Ă "approfondir le mystĂšre du CĆur du Christ comme EspĂ©rance pour le monde".
Valladolid est un lieu symbolique, car le bienheureux Bernardo de Hoyos y a reçu la "Grande Promesse" du Christ : "Je régnerai en Espagne", le 14 mai 1733.
350e Anniversaire des Apparitions à Paray-le-Monial, France (ClÎture du Jubilé : 27-29 juin) :
Marque la clÎture du Jubilé des 350 ans des apparitions à sainte Marguerite-Marie.
Point d'orgue : les "FĂȘtes du SacrĂ©-CĆur", prĂ©sidĂ©es par le cardinal François Bustillo, envoyĂ© spĂ©cial du pape LĂ©on XIV.
L'association Civilisation de lâAmour, en collaboration avec le Sanctuaire de Paray-le-Monial, a ĆuvrĂ© Ă la promotion des consĂ©crations (personnelles, familiales, paroissiales) au SacrĂ©-CĆur.
Un site internet, "Se consacrer", a Ă©tĂ© créé pour faciliter cette dĂ©marche. Les instigateurs considĂšrent la spiritualitĂ© du CĆur de JĂ©sus comme "un trĂ©sor pour notre temps", contribuant Ă "bĂątir une civilisation de l'amour" en permettant aux fidĂšles de "faire lâexpĂ©rience de la rencontre de JĂ©sus et de Son CĆur misĂ©ricordieux".
3. Le Soutien du Pape LĂ©on XIV Ă la DĂ©votion au SacrĂ©-CĆur
ClĂŽture du JubilĂ© des PrĂȘtres Ă Rome (25-27 juin) : La solennitĂ© du SacrĂ©-CĆur clĂŽturera cet Ă©vĂ©nement, avec une messe prĂ©sidĂ©e par le pape LĂ©on XIV sur la Place Saint-Pierre.
Enracinement Spirituel : LĂ©on XIV, en tant que "fils spirituel de saint Augustin", est imprĂ©gnĂ© d'une tradition qui "valorise la contemplation du CĆur du Christ comme source de misĂ©ricorde". Ses armoiries reprĂ©sentent d'ailleurs "un SacrĂ©-CĆur percĂ© d'une flĂšche et posĂ© sur la Bible".
Programme d'ĂvangĂ©lisation : Dans sa premiĂšre lettre aux catholiques de France (31 mai 2025), Ă l'occasion du centenaire de canonisations, LĂ©on XIV cite l'encyclique Dilexit nos du pape François et encourage l'ancrage dans la spiritualitĂ© du SacrĂ©-CĆur : "Il ne saurait y avoir de plus beau et de plus simple programme dâĂ©vangĂ©lisation et de mission pour votre pays : faire dĂ©couvrir Ă chacun lâamour de tendresse et de prĂ©dilection que JĂ©sus a pour lui, au point dâen transformer la vie". Il note que saint Jean Eudes fut "le premier Ă avoir cĂ©lĂ©brĂ© le culte liturgique des CĆurs de JĂ©sus et de Marie".
Continuité et Réponse aux Défis : Le pape Léon XIV "inscrira ses pas dans ceux de ses prédécesseurs, et en particulier ceux du pape François, et voit dans cette dévotion une réponse aux défis spirituels et sociaux de notre temps".
En rĂ©sumĂ©, le mois de juin 2025 est prĂ©sentĂ© comme un moment clĂ© pour la dĂ©votion au SacrĂ©-CĆur de JĂ©sus, marquant l'espoir d'un "nouvel Ă©lan" et d'une "renaissance" Ă l'Ă©chelle europĂ©enne, fortement encouragĂ©e et articulĂ©e par les papes François et LĂ©on XIV comme une voie d'espĂ©rance et d'amour face aux dĂ©fis contemporains.
F.C.
09/06/2025
Parmi celles-ci, on peut citer lâhymne Veni Creator Spiritus, qui, dans sa mĂ©lodie grĂ©gorienne, continue de rĂ©sonner en diverses occasions, et pas uniquement autour de la fĂȘte de la PentecĂŽte. Il est en effet utilisĂ© chaque fois que lâon invoque lâassistance de lâEsprit Saint pour une circonstance particuliĂšre.
Le chant du Veni Creator Spiritus est prescrit pour lâOffice divin durant la PentecĂŽte, mĂȘme sâil nous arrive parfois de lâentendre pendant la Messe, oĂč la sĂ©quence Veni Sancte Spiritus est pourtant prescrite. Lâhymne est attribuĂ© Ă Rabban Maur, archevĂȘque de Mayence au IXe siĂšcle et grande figure de la culture carolingienne. ComposĂ© dans le huitiĂšme mode grĂ©gorien, le texte est dâune grande beautĂ© et riche en thĂ©ologie. Lâauteur semble rivaliser avec lui-mĂȘme pour trouver des titres dignes de lâEsprit Saint, quâil appelle « doux consolateur, don du PĂšre trĂšs haut, eau vive, feu, amour, saint chrĂȘme de lâĂąme, doigt de la droite de Dieu⊠». Dans une strophe, on demande Ă lâEsprit dâĂȘtre lumiĂšre pour lâintelligence et de rĂ©pandre lâamour dans nos cĆurs, en fortifiant nos corps faibles de sa vigueur ferme.
Le cardinal Raniero Cantalamessa, ancien prédicateur de la Maison pontificale, affirme :
« Dans lâhymne le plus cĂ©lĂšbre Ă lâEsprit Saint, le Veni Creator, composĂ© au dĂ©but du IXe siĂšcle, on demande Ă lâEsprit dââallumer une lumiĂšre dans lâespritâ (accende lumen sensibus). (Le mot sensus ne dĂ©signe pas ici les sens extĂ©rieurs, mais, comme souvent dans le latin ecclĂ©siastique, lâintelligence, la pensĂ©e, lâesprit). »
En somme, on demande Ă lâEsprit Saint dâĂ©clairer notre esprit et de soutenir notre cĆur.
Ă cĂŽtĂ© de la version grĂ©gorienne, il existe de nombreuses mises en musique de cet hymne, souvent en polyphonie. Lâune des plus belles, selon moi, est celle de Domenico Bartolucci (1917â2013), ancien maĂźtre de la Chapelle Sixtine et plus tard cardinal. Il en a fait une version pour sopranos, premiers et deuxiĂšmes tĂ©nors, barytons et basses â un chĆur mixte Ă cinq voix. Cette version est souvent interprĂ©tĂ©e lors des cĂ©rĂ©monies pontificales, comme lors du rĂ©cent conclave. Elle sâinspire de la mĂ©lodie grĂ©gorienne, mais en supprimant certaines notes (les notes inutiles, câest-Ă -dire celles qui ne sont pas essentielles Ă la structure mĂ©lodique â une pratique en usage depuis la Renaissance).
TrĂšs touchante est la maniĂšre dont les voix graves, les voix masculines, forment une sorte de fond sonore au chant des sopranos qui, dans la Chapelle Sixtine, sont confiĂ©s Ă lâinnocence vocale des Pueri Cantores. Lâusage traditionnel dâhabiller polyphoniquement les mĂ©lodies grĂ©goriennes a trouvĂ© en Domenico Bartolucci un trĂšs grand maĂźtre, fidĂšle dâailleurs Ă ce quâavait affirmĂ© le concile Vatican II, qui rĂ©serve au chant grĂ©gorien la premiĂšre place, et Ă ce quâavait dĂ©jĂ ordonnĂ© saint Pie X dans son motu proprio sur la musique sacrĂ©e :
« Le chant grĂ©gorien a toujours Ă©tĂ© considĂ©rĂ© comme le modĂšle suprĂȘme de la musique sacrĂ©e. Aussi peut-on poser en principe gĂ©nĂ©ral : plus une composition sacrĂ©e sâinspire, dans sa forme, son inspiration et sa saveur, de la mĂ©lodie grĂ©gorienne, plus elle est propre au culte divin ; plus elle sâen Ă©loigne, moins elle est digne du sanctuaire. »
Une rĂšgle que le maĂźtre toscan a suivie de maniĂšre exemplaire.
Il existe de nombreuses compositions en lâhonneur de lâEsprit Saint, que lâon entendait souvent lors de la fĂȘte de la PentecĂŽte. LâEsprit Saint a inspirĂ© des musiciens et des artistes de toutes les Ă©poques. Dans une homĂ©lie prononcĂ©e pour le vingt-cinquiĂšme anniversaire de sa consĂ©cration Ă©piscopale, en contemplant la colombe du Bernin dans la basilique Saint-Pierre, Pie XII disait :
« Tout Ă lâheure, alors que, au pied de cet autel, dans les souvenirs graves qui Ă©mouvaient et inondaient Notre Ăąme, Nous revĂȘtions les ornements sacrĂ©s pour nous prĂ©parer Ă cĂ©lĂ©brer le Sacrifice eucharistique, Notre regard, se levant, contemplait resplendissante, du haut de ce merveilleux baldaquin, au milieu de rayons dâor, lâimage de la colombe aux ailes dĂ©ployĂ©es â symbole Ă©vangĂ©lique et rĂ©confortant de lâEsprit Saint Paraclet, qui veille sur lâĂglise, y souffle et y rĂ©pand les multiples charismes de sa grĂące et lâabondance de sa paix spirituelle. Câest un symbole qui parle. »
Oui, un symbole qui parle en tout temps, comme dans lâhymne dont nous avons parlĂ©, oĂč le doux Consolateur est implorĂ© pour ĂȘtre lumiĂšre de notre intelligence et soutien dans lâĂ©preuve.
08/06/2025
Samedi vigile de la PentecĂŽte, comme chaque annĂ©e, Chartres est en effervescence dĂšs les premiĂšres lueurs de lâaube. Venus des quatre coins de France voire mĂȘme de Suisse, dâAllemagne du Canada ou dâautres pays Ă©trangers, plusieurs milliers de pĂšlerins se dirigent vers la cathĂ©drale de Chartres. Cette annĂ©e encore, ils sont plus de 5â400 Ă assister Ă la messe de dĂ©part avant de prendre la route en direction de Paris.
La premiĂšre mission des marcheurs consistait Ă rejoindre la cathĂ©drale, aprĂšs avoir dĂ©posĂ© leur sac de bivouacs dans le bon camion. Ă 7 h 45 trĂšs prĂ©cisĂ©ment, la messe dĂ©bute cĂ©lĂ©brĂ©e par Monsieur lâabbĂ© Gabriele dâAvino, le supĂ©rieur de district dâItalie. Cette annĂ©e, comme les pĂšlerins marchent « pour notre mĂšre, la Sainte Ăglise »,
Ă 10 h, aprĂšs que Monsieur lâabbĂ© Hanappier a bĂ©ni les chapitres adolescents, la colonne adulte a pris la route tandis que les enfants se dirigeaient vers les cars. Il nâaura pas fallu longtemps aux pĂšlerins pour sortir manteaux et ponchos pour quelques gouttes tombĂ©es au dĂ©but de la marche. Les nuages gris ont suivi la colonne presque toute la journĂ©e, heureusement il en faut plus pour impressionner un pĂšlerin de Chartres !
Source : La Porte latine
Crédits photos : Isaure Dupont-Cariot, Maxence Malherbe, Jean Lorber, Gilles Bellemans, Soline Grellier, Jacques Teyssier
07/06/2025
L'iconographie imprĂšgne tellement notre imaginaire chrĂ©tien que nous croyons spontanĂ©ment que la Vierge Marie Ă©tait au milieu des apĂŽtres Ă la PentecĂŽte. Or lâĂcriture nâen dit rien. Lorsquâil introduit son rĂ©cit de la PentecĂŽte, Luc Ă©crit : « Le jour de la PentecĂŽte Ă©tant arrivĂ©s, ils se trouvaient tous ensemble dans un mĂȘme lieu » (Ac 2, 1). « Ils », ce sont les Douze aprĂšs lâĂ©lection de Matthias. Alors, pourquoi reprĂ©senter Marie parmi les Douze Ă la PentecĂŽte, parfois au milieu dâeux, parfois Ă une place Ă©minente ? Dâabord Ă cause dâun verset du chapitre prĂ©cĂ©dent dans les Actes : « Tous, dâun mĂȘme cĆur, Ă©taient assidus Ă la priĂšre avec quelques femmes, dont Marie mĂšre de JĂ©sus, et avec ses frĂšres » (Ac 1, 14). Câest dâailleurs lâunique mention de Marie dans les Actes. On interpole donc ce verset Ă raison de lâidentitĂ© de situation : les Douze en priĂšre. Sur ce fondement scripturaire tĂ©nu, la piĂ©tĂ© chrĂ©tienne se plaĂźt Ă penser que la Vierge Marie a intercĂ©dĂ© tout particuliĂšrement pour que lâEsprit saint descende sur les Douze Ă la PentecĂŽte. Ce nâest pas totalement gratuit.
Ăpouse de lâEsprit saint
Câest que la Vierge Marie Ă©tait dans une familiaritĂ© unique avec lâEsprit saint depuis lâAnnonciation oĂč il lâavait recouverte de son ombre. Elle Ă©tait particuliĂšrement qualifiĂ©e pour appeler lâEsprit saint. On a mĂȘme pu la qualifier dâĂ©pouse du Saint-Esprit, ce qui est tout de mĂȘme moins malsonnant que ceux qui la voient Ă©pouse mystique du Christ au risque dâintroduire lâinceste au beau milieu de la Sainte Famille. Surtout, la Vierge Marie se devait de rĂ©aliser la mission que lui avait confiĂ©e JĂ©sus Ă la Croix. Pour ĂȘtre mĂšre de lâĂglise, il fallait que Marie coopĂšre rĂ©ellement et selon une modalitĂ© propre Ă lâengendrement des Douze Ă la vie nouvelle dâenfants de Dieu. En intercĂ©dant efficacement pour que lâEsprit saint descende sur eux, Marie devient rĂ©ellement mĂšre de lâĂglise dans lâordre de la grĂące, selon la formule audacieuse de Lumen Gentium, 61.
Comme souvent, la dĂ©votion voit plus loin quâon ne le croit. Si Marie a rĂ©ellement jouĂ© un rĂŽle dĂ©cisif en appelant lâEsprit saint sur les ApĂŽtres, elle nâa fait quâaccomplir en perfection ce quâelle a fait dĂ©jĂ Ă Cana : voir les besoins des hommes, prĂ©venir leurs dĂ©sirs, et intercĂ©der auprĂšs de son Fils tout en nous avertissant : « Faites tout ce quâil vous dira » (Jn 2, 5). Câest Ă Cana quâest rĂ©vĂ©lĂ©e la modalitĂ© propre de la maternitĂ© de Marie dans lâordre de la grĂące, toute subordonnĂ©e Ă lâaction souveraine du Christ, lâunique Sauveur et mĂ©diateur. Ă Cana, sur la priĂšre de sa mĂšre, JĂ©sus avait anticipĂ© le dĂ©but de son ministĂšre public et lâĆuvre de la RĂ©demption quâil Ă©tait venu accomplir. Au CĂ©nacle, Marie provoque Ă nouveau une Ă©tape dĂ©cisive dans lâhistoire de lâĂglise avec lâeffusion de lâEsprit saint sur les Douze pour que JĂ©sus glorifiĂ© puisse communiquer sa grĂące Ă tout son corps mystique. LâEsprit saint qui Ă©tait venu couvrir Marie de son ombre Ă lâAnnonciation se rĂ©pand par son intercession sur toute lâĂglise.
Lâintercession de sa tendresse maternelle
Le rĂ©cit de Cana aide aussi Ă comprendre comment lâunique grĂące qui vient du Christ est colorĂ©e dâune nuance maternelle par la mĂ©diation de Marie. Cette tendresse attentive et frĂ©missante de la maman qui voit les moindres dĂ©sirs et les besoins les plus cachĂ©s de ses enfants, Marie peut dâailleurs lâexercer avec une efficacitĂ© dâautant plus grande depuis quâelle est dans la vision bĂ©atifique. Depuis le Ciel oĂč elle est entrĂ©e en son Ăąme et en son corps, Marie voit tout ce dont ses enfants ont besoin, et elle porte nos supplications Ă son Fils.
Cette maternitĂ© de Marie sur lâĂglise, câest-Ă -dire sur chacun des baptisĂ©s mais aussi sur la communautĂ© des enfants de Dieu prise comme un tout, est-elle si diffĂ©rente de lâintercession commune des saints au Ciel Ă lâĂ©gard des chrĂ©tiens encore en chemin ? Ă vrai dire, son intercession est de toute façon la plus efficace dans la communion des saints Ă proportion de son intimitĂ© unique avec JĂ©sus. Son association toute particuliĂšre Ă lâĆuvre du RĂ©dempteur aux jours de sa chair donne Ă son intercession une qualitĂ© unique.
La grùce du Christ passe forcément par Marie
Marie est-elle source de la grĂące ? Non, cela est rĂ©servĂ© au Christ. Le terme de « corĂ©demptrice » est sans doute trop lourd dâambiguĂŻtĂ© Ă cet Ă©gard et le concile sâest bien gardĂ© dâen user. Mais si toute grĂące vient du Christ-TĂȘte du corps mystique, toute grĂące passe par Marie qui est selon lâimage suggestive de saint Bernard comme le cou du corps mystique. De la tĂȘte au corps, du Christ Ă nous, il y a toujours Marie. Le Christ nâen avait pas besoin et pouvait nous atteindre tous et chacun sans cela. Mais il a voulu nous donner sa mĂšre par pure gratuitĂ©, par un surcroĂźt dâamour et de considĂ©ration pour notre condition humaine. DĂšs lors, toute grĂące qui vient du Christ passe forcĂ©ment par Marie. Et la grĂące qui est fondamentalement christique est comme modalisĂ©e par la mĂ©diation mariale. La grĂące christique est colorĂ©e dâune nuance maternelle de tendresse. Notre vie dâenfants de Dieu sâen trouve mieux accordĂ©e aux requĂȘtes de notre affectivitĂ©, « maintenant et Ă lâheure de notre mort », et jusquâĂ la consommation de lâĂglise dans la gloire du Ciel.
Marie Ă©tait-elle au CĂ©nacle pour appeler lâEsprit saint sur les Douze ? LâĂcriture ne le dit pas. Mais dans la foi de lâĂglise enrichie par la priĂšre des saints, nous croyons que par sa proximitĂ© unique au Christ et Ă lâEsprit saint elle nous engendre Ă la vie de la grĂące et nous comble de sa tendresse maternelle pour nous mener sous la protection de son manteau Ă©toilĂ© jusque dans la gloire du Ciel.
07/06/2025
[âŠ] Une certaine simplification mĂ©diatique laisse Ă croire que toute la question se rĂ©sumerait Ă autoriser ou non certains prĂȘtres Ă cĂ©lĂ©brer le Novus Ordo pour leurs messes personnelles au pĂšlerinage. Mais en fait, ce nâest pas dâabord de cela dont il sâagit. Les courriers reçus par lâassociation sont trĂšs clairs : il nous est demandĂ© de transformer en profondeur lâesprit de notre pĂšlerinage traditionnel, en faisant du Novus Ordo la norme, et du Vetus Ordo lâexception tolĂ©rĂ©e, soumise Ă lâautorisation de lâĂ©vĂȘque du lieu ou du dicastĂšre pour le culte divin. Or, câest cette mĂȘme mutation qui est exigĂ©e depuis quatre ans Ă toute notre famille spirituelle que lâon dĂ©signe (assez mal dâailleurs) par le mot de « traditionalistes ». Car il faut replacer cette rĂ©cente polĂ©mique, qui peut sembler anecdotique pour beaucoup, dans la perspective dâautres Ă©vĂšnements que nous avons refusĂ© de mĂ©diatiser pour ne pas durcir le dialogue que nous espĂ©rons avoir avec les autoritĂ©s hiĂ©rarchiques. Cette annĂ©e, pour le pĂšlerinage de Chartres comme pour de nombreux pĂšlerins venus de toutes nos provinces, des restrictions Ă lâusage de la liturgie tridentine se multiplient pour endiguer lâĂ©lan formidable des apostolats qui veulent Ćuvrer au service de lâĂ©vangĂ©lisation missionnaire des rĂ©gions de France. LâaccĂšs Ă certains sacrements selon lâancien rituel est limitĂ© voire interdit dans une partie des diocĂšses. Bien sĂ»r, la portĂ©e de ces restrictions varie, selon la bienveillance de lâĂ©vĂȘque du lieu, preuve en est quâune lecture tolĂ©rante de Traditionis Custodes est possible. Mais dans certains diocĂšses pleuvent les dĂ©crets et les interdits, selon une application ultrarestrictive du Motu Proprio, avec une froideur juridico-canonique bien Ă©loignĂ©e du « soin pastoral et spirituel des fidĂšles » quâĂ©voque ce mĂȘme texte (art 3, § 4). Ce que lâon nous dit aujourdâhui en fait, câest que la liturgie tridentine, en son unitĂ© rituelle, sacramentelle et spirituelle est un mal, une anomalie, dont il faut que lâĂglise guĂ©risse et se purifie.
« Vous ne pouvez pas ĂȘtre dans la communion de lâĂglise, si vous nâadoptez pas le Novus Ordo, partiellement ou totalement. Dura lex, sed lex. Rentrez dans le rang : lâĂglise a parlĂ©, obĂ©issez. » Mais nous avons souvenir, quant Ă nous, dâune autre parole, certaine, de lâĂglise, qui plus est une promesse, dans laquelle notre famille spirituelle a mis toute sa confiance. En 1988, alors que Mgr Lefebvre sacrait quatre Ă©vĂȘques contre lâavis de Rome, les laĂŻcs organisateurs du pĂšlerinage de ChrĂ©tientĂ© ont pris la dĂ©cision profondĂ©ment douloureuse de sâĂ©carter de cette voie pour rester unis de façon visible au Saint-SiĂšge. Câest au nom de lâunitĂ© de lâĂglise, quâon nous accuse aujourdâhui de mettre Ă mal, que ces laĂŻcs et ces prĂȘtres, profondĂ©ment attachĂ©s aux pĂ©dagogies traditionnelles de la foi, se sont tournĂ©s vers le saint pape Jean-Paul II. Ce jour-lĂ , le Saint PĂšre leur a dit que leur attachement Ă©tait « lĂ©gitime » ; il a Ă©voquĂ© la beautĂ© et la richesse de ce trĂ©sor de lâĂglise ; et pour faire honneur Ă cette dĂ©marche filiale, il a fait la promesse de garantir et de protĂ©ger, de maniĂšre large et gĂ©nĂ©reuse, les aspirations des fidĂšles attachĂ©s aux formes liturgiques et disciplinaires antĂ©rieures de la tradition latine, sans aucune contrepartie dâordre liturgique, sinon de reconnaĂźtre le Concile Vatican II et la validitĂ© du Novus ordo. LâĂglise catholique, prenant en considĂ©ration les personnes, et leur histoire, nous a dit que nous sommes en communion avec lâĂglise en faisant le choix de la liturgie tridentine comme chemin vĂ©ritable de sanctification. Nous ne pouvons douter de cette parole, dont la valeur demeure car elle dĂ©passe les douloureuses contingences historiques de 1988.
Aujourdâhui encore, malgrĂ© les vexations multiples, notre famille spirituelle conserve une paisible espĂ©rance dans cette parole de lâĂglise, de qui elle a appris quâen justice naturelle, pacta sunt servanda (la parole donnĂ©e doit ĂȘtre tenue). On nous dit que nous avons rompu le pacte, en durcissant nos positions, en refusant les mains tendues. Mais depuis 1988, nous nâavons rien changĂ© de ce dĂ©licat Ă©quilibre entre fidĂ©litĂ© envers le SiĂšge de Pierre et attachement aux pĂ©dagogies traditionnelles de la Foi.
On a peu approfondi en quoi consistait cet « attachement » aux pĂ©dagogies traditionnelles de la foi. Certains le minimisent, le rĂ©duisant Ă une sensibilitĂ©, Ă une catĂ©gorie politique, Ă une nostalgie craintive ou une peur de la modernitĂ© qui passera avec le temps et la gĂ©nĂ©ration suivante. Dâautres lâexagĂšrent, nous reprochant de faire de la liturgie une fin en soi, ou de lâinstrumentaliser telle une arme au service dâun combat. Nous savons bien pourtant, nous pĂšlerins, que la fin câest le Ciel, quâil ne faut pas confondre le but dâavec la route qui y conduit, et quâil y a plusieurs chemins qui mĂšnent au Sanctuaire de tout repos. Mais nous croyons en lâimportance des mĂ©diations dans lâordre du Salut, en la valeur intrinsĂšque de celles-ci. Nous croyons en la libertĂ© des enfants de Dieu pour user, selon leurs besoins et leur prudence, des richesses que lâĂglise leur propose depuis 2000 ans. Or, pour notre famille spirituelle, la liturgie traditionnelle est purement et simplement le milieu surnaturel de notre rencontre avec le Christ. Ses mots, ses sacrements, sa messe, ses offices, sa catĂ©chĂšse ont Ă©tĂ© pour beaucoup dâentre nous la matiĂšre premiĂšre de notre foi, le vecteur de la grĂące, lâexpression instinctive de notre relation Ă Dieu : en un mot, notre langue maternelle pour parler au Seigneur, mais aussi pour lâentendre. Pour dâautres, ces harmoniques ont Ă©tĂ© la cause, seconde mais providentielle, dâune conversion, ou dâun renouvellement radical de la foi. Pour beaucoup de prĂȘtres, cette liturgie est devenue âviscĂ©raleâ, au sens biblique, pĂ©nĂ©trant de façon totalisante chaque fibre de leur ĂȘtre sacerdotal. Il nâest pas question-lĂ de vague sentimentalitĂ© esthĂ©tique, mais de vie, de respiration, dâexpression incarnĂ©e de la foi. Qui croit que le christianisme est une religion de lâIncarnation comprend que ces mĂ©diations ne sont nullement accidentelles, accessoires ou interchangeables Ă coup de dĂ©crets et dâinterdits.
Le pĂšlerinage est un lieu, dans lâĂglise, oĂč des laĂŻcs et des prĂȘtres viennent pour faire lâexpĂ©rience de cette respiration et de ce langage particuliers dans lâĂglise. Il nâest dâailleurs pas que cela : il est aussi une occasion formidable pour 19000 pĂšlerins de proposer Ă nos contemporains un tĂ©moignage lumineux de la beautĂ© de la foi catholique, de ferveur spirituelle, Ă travers ses processions, ses adorations, ses confessions, ses messes. Il est aussi un lieu dâamitiĂ© chrĂ©tienne internationale, de vie de chapitres, de retrouvailles, de dĂ©pouillement, de pĂ©nitence joyeuse. Il est enfin ce lieu de lâexpĂ©rience dâune chrĂ©tientĂ©, les pĂšlerins partageant la conviction quâil est urgent de promouvoir la royautĂ© sociale de Notre Seigneur sur les sociĂ©tĂ©s temporelles. Il est tout cela Ă la fois, dans une harmonie qui nâest pas une fin en soi, mais qui nâest en aucun cas secondaire Ă nos yeux lorsque lâon considĂšre les fruits spirituels quâelle porte. Certes, on nous le rappelle avec force, les laĂŻcs nâont pas dâautoritĂ© en matiĂšre de liturgie. Mais ils demeurent libres en droit de fonder des associations, dây inviter qui ils souhaitent, et de choisir de valoriser certains thĂšmes comme moyens privilĂ©giĂ©s de mettre en Ćuvre la finalitĂ© de tout apostolat laĂŻc : « le renouvellement chrĂ©tien de lâordre temporel » (Apostolicam actuosem, 7). Nous citons Ă dessein ce texte de Vatican II qui reconnaĂźt une juste autonomie de lâapostolat des laĂŻcs et de ses choix dâactions, le protĂ©geant du danger toujours menaçant dâun dangereux clĂ©ricalisme. Nous ne trompons personne ; nous nâavons jamais masquĂ© nos spĂ©cificitĂ©s ; et nous savons que ces thĂšmes sont loin dâĂȘtre partagĂ©s par tous les chrĂ©tiens. Mais le pĂšlerinage de Chartres ne convient pas Ă tous les chrĂ©tiens ! Nous nâavons jamais eu lâaudace de nous considĂ©rer comme apportant une rĂ©ponse universelle qui parle Ă tout le peuple de Dieu. Nous sommes nous-mĂȘmes surpris par lâattractivitĂ© de cette Ćuvre, pourtant si spĂ©ciale Ă de multiples Ă©gards. Et fort heureusement, il existe dâautres Ćuvres dans lâĂglise, qui valorisent dâautres expressions de la foi, utilisant des moyens qui leurs sont propres et qui ne sont pas les nĂŽtres, mais qui apportent une complĂ©mentaritĂ©, avec un dynamisme missionnaire ou un Ă©lan caritatif qui peut forcer lâadmiration. Nous entretenons dâailleurs avec certaines dâentre elles dâexcellentes relations de collaboration, et jamais il nâa Ă©tĂ© exigĂ© entre nous que, pour travailler ensemble, il fallait ĂȘtre tous pareil et diluer nos particularismes. Car le mystĂšre du Verbe IncarnĂ© est trop riche pour ĂȘtre dit en un seul langage ; et, pour reprendre les propos pertinents dâun thĂ©ologien qui nâappartient certainement pas Ă notre famille dâesprit, « il nây a rien de plus contraire Ă la vĂ©ritable unitĂ© chrĂ©tienne que la recherche de lâunification. Celle-ci consiste toujours Ă vouloir rendre universelle une forme particuliĂšre, Ă enfermer la vie dans une de ses expressions. »
Cette expression particuliĂšre de la foi dont nous faisons lâexpĂ©rience Ă Chartres est aujourdâhui Ă nouveau menacĂ©e. Aujourdâhui une partie du peuple chrĂ©tien suffoque, parce quâon cherche Ă entraver la respiration de son Ăąme par une sorte de violation de sa conscience. On sait pourtant les dĂ©gĂąts qui peuvent se produire dans une Ăąme, lorsquâon veut la priver autoritairement de la mĂ©diation connaturelle et sensible Ă travers laquelle elle a appris Ă toucher le Dieu invisible : câest ce qui sâest passĂ© en 1969 par exemple. Rien nâest plus violent, spirituellement, que de sâentendre dire que notre « langue » ne pourra plus dĂ©sormais ĂȘtre parlĂ©e que de façon exceptionnelle au cĆur mĂȘme du pĂšlerinage de Chartres. Ou de sentir, comme plusieurs nous lâont affirmĂ© directement, quâelle est suspecte dâhĂ©rĂ©sie, que ses sacrements seraient de fait invalides, que la cĂ©lĂ©bration de cette messe devrait ĂȘtre interdite. Car tout cela nous a Ă©tĂ© dit. En revanche, rarement est reconnue la valeur intrinsĂšque de la liturgie traditionnelle, et les bienfaits positifs quâapportent ces pĂ©dagogies aux pĂšlerins lâespace de trois jours. Notre spĂ©cificitĂ© est masquĂ©e, voire niĂ©e, considĂ©rĂ©e comme anecdotique ou accessoire Ă lâesprit du pĂšlerinage ou Ă son succĂšs ; elle serait la fixette dâune vieille gĂ©nĂ©ration qui nâest aucunement partagĂ©e par la jeune selon le slogan mainte fois entendu : « Les jeunes ne viennent pas pour cela ». Toujours est-il que câest « cela » que nous proposons pendant trois jours depuis 43 ans, et que nous nâinscrivons personne de force. Nous entendre dire quâune messe selon le Vetus Ordo peut aisĂ©ment ĂȘtre remplacĂ©e par une messe selon le Novus Ordo en latin, ad orientem, avec de lâencens et du grĂ©gorien : cela tĂ©moigne douloureusement du peu de considĂ©ration qui est fait du lien vital et spirituel qui lie harmonieusement les pĂ©dagogies traditionnelles de la foi. On nous dit que le pĂšlerinage sera enfin pleinement « dâĂglise » lorsquâil sâouvrira au Novus Ordo. Nous recevons cela avec la mĂȘme violence que lorsque lâon dit Ă une minoritĂ© quâelle sera enfin acceptĂ©e par la majoritĂ© lorsquâelle renoncera Ă sa culture, lorsquâelle diluera sa richesse pour se fondre dans la masse. Ce que la sociĂ©tĂ© civile est parvenue Ă faire pour protĂ©ger lâidentitĂ© des minoritĂ©s au nom de la justice naturelle et du respect des personnes et des cultures, nous avons la certitude que lâĂglise peut aussi y parvenir sans ruiner son unitĂ©.
Contrairement Ă ce qui a Ă©tĂ© Ă©crit, nous ne posons pas dâinterdits liturgiques au pĂšlerinage : nous en subissons nous-mĂȘme suffisamment. Mais nous souhaitons que le pĂšlerinage continue dâĂȘtre un lieu ou la liturgie traditionnelle est aimĂ©e et mise en avant, notamment par les cadres, et donc par les prĂȘtres. Cette annĂ©e encore, plusieurs prĂȘtres nous disent quâils sont heureux dâapprendre cette liturgie pour venir au pĂšlerinage. Nous avons un contact direct avec chacun en amont de leur inscription, et nous leur demandons deux choses : de se mettre au service de tous les pĂšlerins et non de leurs propres fidĂšles, pour ĂȘtre tout Ă tous et pour quâaucun chapitre ne manque du ministĂšre de la confession, et de valoriser auprĂšs des pĂšlerins le thĂšme de la chrĂ©tientĂ© et la liturgie tridentine. Nous leur demandons de jouer le jeu de lâesprit propre Ă ces trois journĂ©es dâamour et de mise en avant de ces trĂ©sors spirituels, et non pas dâessayer de changer le pĂšlerinage. Nous distinguons bien entre ceux qui ne veulent pas partager ces fondamentaux et ne manifestent pas dâintĂ©rĂȘt pour eux â ceux-lĂ ne viennent pas dâeux-mĂȘmes â et ceux qui apprĂ©cient sincĂšrement le pĂšlerinage et ses piliers mais ne peuvent pas encore cĂ©lĂ©brer la forme tridentine, soit par manque de temps pour lâapprendre, soit parce quâils sont interdits de la cĂ©lĂ©brer. Pour eux, aussi rares soient-ils, nous avons toujours essayĂ© de trouver des solutions pour exercer lâhospitalitĂ© liturgique et leur permettre de venir.
Pour poser des bases saines au dialogue que nous appelons de nos vĆux, il faut encore dire ceci. Si nous sommes attachĂ©s aux pĂ©dagogies traditionnelles de la foi dans leur intĂ©gralitĂ©, ce nâest pas uniquement parce que nous avons pour elles un attachement viscĂ©ral ; mais câest aussi parce nous constatons que lâĂglise traverse depuis trop longtemps une crise majeure, une crise doctrinale et liturgique. Il y a lĂ une difficultĂ© dont nous sommes conscients : lâexistence des communautĂ©s traditionnelles apparaĂźt Ă certains comme un « reproche vivant » vis-Ă -vis dâautres mĂ©thodes pastorales et liturgiques dans lesquelles on voudrait, de force, nous diluer. PrĂ©cisons donc les choses. Oui, nous recevons intĂ©gralement le Concile Vatican II et le magistĂšre rĂ©cent de lâĂglise, nous lâĂ©tudions dans nos livrets de formations, nous lâinterprĂ©tons, selon le vĆu de BenoĂźt XVI, Ă la lumiĂšre de la Tradition, rejetant les interprĂ©tations erronĂ©es que lâon peut faire de certains passages ambigus du texte conciliaire4 . Nous ne sommes pas de ceux qui souhaitent Ă©tablir une rupture entre « Ăglise prĂ©conciliaire » et « Ăglise postconciliaire ». Nous croyons en la Tradition vivante (que nous ne confondons aucunement avec les traditions humaines), au dĂ©veloppement organique du dogme, mais nous savons que lâĂglise ne peut modifier, au nom du progrĂšs ou de lâadaptation au monde, la doctrine du JĂ©sus sur les points aussi essentiels que la thĂ©ologie de la messe, la doctrine du sacerdoce, lâindissolubilitĂ© du mariage ou la morale catholique. Nous sommes profondĂ©ment inquiets de voir que le relativisme doctrinal et le progressisme moral continuent de prospĂ©rer en de nombreux lieux de lâEglise aujourdâhui encore. Nombre de nos pĂšlerins, mĂȘme dans la trĂšs jeune gĂ©nĂ©ration, reconnaissent nâavoir rien reçu en formation doctrinale, se considĂšrent comme des gĂ©nĂ©rations sacrifiĂ©es, ont lâimpression quâon leur a cachĂ© le contenu de leur foi, et viennent trouver au pĂšlerinage des rĂ©ponses claires. Le « kaĂŻros » que nous vivons demande que nous ayons le courage de poser un constat lucide sur cette crise de la transmission de la foi qui continue aujourdâhui, et de rĂ©flĂ©chir ensemble sur les moyens Ă mettre en Ćuvre pour en sortir, car lâunitĂ© de lâĂglise est dâabord une unitĂ© dans la foi. [âŠ]
06/06/2025
Chers PĂšlerins,
Vous partez pĂ©rĂ©griner sous le regard bienveillant et protecteur de toutes les armĂ©es cĂ©lestes et de la cour des saints. La TrĂšs Sainte Vierge est Ă©mue de tant dâardeur et de dĂ©votion. Comme le chante Charles PĂ©guy, votre illustre prĂ©dĂ©cesseur sur les chemins de la Beauce, lorsquâil sâadresse Ă Notre Dame :
« Vous nous voyez marcher sur cette route droite, / Tout poudreux, tout crottĂ©s, la pluie entre les dents. [âŠ] Nous allons devant nous, les mains le long des poches, / Sans aucun appareil, sans fatras, sans discours, / Dâun pas toujours Ă©gal, sans hĂąte, ni recours [âŠ] / Vous nous voyez marcher, nous sommes la piĂ©taille. / Nous nâavançons jamais que dâun pas Ă la fois. » (La Tapisserie de Notre Dame. PrĂ©sentation de la Beauce Ă Notre Dame de Chartres)
Vingt siĂšcles de France chrĂ©tienne vous prĂ©cĂšdent, peuples et rois, saints et pĂ©cheurs, martyrs et soldats, pauvres et riches, puissants et petits. Sur vos Ă©paules repose cet hĂ©ritage de tant de priĂšre, de tant de sacrifice, de tant de charitĂ©. Il y a de quoi trembler en recevant Ă votre tour un tel trĂ©sor, aussi lancez-vous sans crainte, avec respect, en laissant sa juste place au silence, Ă la contemplation, en Ă©vitant les bavardages, en Ă©cartant une attitude superficielle car le divertissement nâa pas ici sa place. Vos souliers soulĂšveront la poussiĂšre ou sâenfonceront dans la boue, le ciel vous enverra pluie et soleil, et vos pieds endoloris deviendront peut-ĂȘtre la premiĂšre preuve de votre amour de Dieu. Vous mĂ©diterez sur le rĂšgne de Notre-Seigneur au ciel et sur la terre. Vos douleurs, votre effort, vos mortifications seront des petites pierres participant modestement Ă la construction de cet Ă©difice.
La grande falsification du monde ne date pas dâaujourdâhui, mĂȘme si nous possĂ©dons plus de moyens pour commettre le mal que nos lointains aĂŻeux. Cette procession, qui va relier la TrĂšs Sainte Vierge de Paris, patronne de la France en son Assomption, et Notre Dame au milieu des champs et des blĂ©s, sâinscrit Ă la suite de ce que proclamait dĂ©jĂ le prophĂšte IsaĂŻe :
« Quâils sont beaux sur les montagnes les pieds du messager, qui publie la bonne nouvelle de la paix ; de celui qui annonce le bonheur, qui publie le salut ; de celui qui dit Ă Sion : âTon Dieu rĂšgne !â » (IsaĂŻe, LII. 7)
Ă notre Ă©poque poly-hĂ©rĂ©tique,- temps de dĂ©construction de tout le message chrĂ©tien, rĂ©sistance diabolique Ă la RĂ©vĂ©lation-, chaque pas effectuĂ© par une simple sentinelle contribue au rĂšgne de Dieu, qui est effectif mĂȘme sâil nâest pas reconnu et acceptĂ©. Il dĂ©pend de chacun dâentre vous de prendre son Ă©lan en ces jours de marche joyeux et spartiates. Il ne faudrait pas ensuite faiblir dans cet envol et beaucoup va se jouer en ces heures qui vous attendent, dans la façon dont vous intĂ©rioriserez chaque instant, dont vous offrirez chaque dĂ©sagrĂ©ment, chaque inconfort.
Emmagasinez les forces spirituelles et les nourritures de lâĂąme pour rĂ©sister dans un monde souvent hostile qui veut diviniser lâhomme, qui cherche Ă unifier tous les peuples en une Tour de Babel et qui rĂȘve de construire sur terre un Paradis Ă lâopposĂ© de Dieu. Votre pĂšlerinage, bien vivant, est un tĂ©moignage du refus de sâagenouiller devant les maĂźtres de cette terre et leurs Ćuvres de mort. Mais ne vous y trompez pas : le Malin saisit chaque occasion, mĂȘme les plus saintes, pour essayer dâavancer ses pions. Alors demeurez sur vos gardes, par lâattention du cĆur, par la frĂ©quentation des sacrements, par lâancrage dans la priĂšre, par lâexercice de la pĂ©nitence. Saint Pierre ne cesse de nous avertir :
« Soyez sobres, veillez ; votre adversaire, le diable, comme un lion rugissant, rĂŽde autour de vous, cherchant qui dĂ©vorer. RĂ©sistez-lui, fermes dans la foi [âŠ] » (Ire ĂpĂźtre de saint Pierre, V. 7)
Charles Baudelaire, ce torturĂ© du surnaturel, avait bien rĂ©sumĂ© la situation de nos siĂšcles malades en prĂ©cisant que la plupart des gens croient en Dieu mais ne Lâaiment pas, tandis quâils aiment le diable auquel ils ne croient pas.
Au cours de votre pĂšlerinage, serviteurs du rĂšgne de Dieu, reprenez la mĂ©ditation des deux Ă©tendards dans les Exercices Spirituels de saint Ignace de Loyola car il sâagit de lâĂ©ternel combat de lâhistoire des hommes et de chaque histoire personnelle : le souverain et vrai capitaine, le Christ Notre-Seigneur, se tient en humble place avec lâarmĂ©e des pĂ©cheurs repentants que nous sommes, tandis que Lucifer, avec son aspect terrifiant, rĂ©unit, avec ses troupes de dĂ©mons, tous les hommes soucieux dâhonneurs, de plaisirs et de gloire mondaine. Il faut choisir un camp, celui de Dieu bien sĂ»r, et sây fixer cahin-caha, clopin-clopant.
Saint Augustin, rescapĂ© du pĂ©chĂ© et de lâhĂ©rĂ©sie, ne regarde plus que la CitĂ© de Dieu, et il nous conseille ainsi :
« Nous sommes des voyageurs. Quâest-ce que voyager ? Je le dis dâun mot : avancer. Que toujours te dĂ©plaise ce que tu es, pour parvenir Ă ce que tu nâes pas encore⊠Avance toujours, marche toujours, ajoute toujours. Ne demeure pas en chemin, ne recule pas, ne sors pas de la route. Il demeure immobile celui qui nâavance pas. Mieux vaut un boiteux sur la route quâun coureur hors de la route. » (Sermons)
Les tĂ©nĂšbres qui sont tombĂ©es sur la terre, comme le soulignait Pie XII en 1939, ne sont pas une fatalitĂ© tant que des Ăąmes humbles et fidĂšles demeureront, mĂȘme comme un petit reste. Ne nous Ă©garons pas et demeurons dans ce cortĂšge incessant en route vers le Paradis. Que ces trois jours vous fassent dĂ©boucher sur la RĂ©surrection.
Chers PĂšlerins, serrez dans votre besace les richesses de la Tradition et glissez-y aussi les intentions pour lâĂglise et pour le Souverain Pontife LĂ©on XIV. Soyez des boiteux paisibles, enthousiastes, tout tournĂ©s vers le Ciel.
Que la TrÚs Sainte Vierge vous protÚge dans son manteau de miséricorde, que les anges et tous les saints accompagnent vos chants et soutiennent vos pas.
Que le rĂšgne de Dieu envahisse vos cĆurs !
P. Jean-François Thomas s
05/06/2025
Je vous livre ici un article bien argumenté de notre amie Jeanne Smits qui considÚre que la Russie va ressusciter l'URSS communiste. On peut néanmoins objecter que les Russes, profondément patriotes, ont décidé d'assumer leurs erreurs et ne pas sombrer dans la repentance qui nous fait tant de mal à nous Français. Pour illustrer cette opinion, je vous livre aprÚs l'article un magnifique clip patriotique de l'hymne russe qui glorifie indiféremment son Histoire politique et religieuse dont les taches ont été lavées par le sang ... o combien versé ! De fait, la question est juste de savoir si la consécration de la Russie au Coeur Immaculé de Marie a bien été réalisée comme le demandait la sainte Vierge ... PO.
Voici le texte de Jeanne Smits :
Le correspondant de la BBC Ă Moscou, Steve Rosenberg, a publiĂ© il y a quelques jours un reportage vidĂ©o tournĂ© dans la capitale russe, oĂč il a assistĂ© au « DĂ©filĂ© de la Victoire ». Lâoccasion pour lui de montrer que la mĂ©moire de Staline est de plus en plus magnifiĂ©e dans cette Russie guerriĂšre oĂč la population ne se demande pas seulement « ce que lâavenir lui rĂ©serve » : « Ils ne savent pas non plus ce que leur rĂ©serve le passĂ© : ici, le passĂ© est en constante Ă©volution », Ă©crit le journaliste. La vision de Staline en est un exemple, mais les choses vont en rĂ©alitĂ© plus loin : lâidĂ©e se rĂ©pand aujourdâhui que lâURSS nâest pas morte. LĂ©galement, du moins. Le communisme soviĂ©tique est en tout cas un Ă©lĂ©ment de lâhistoire que lâon peut valoriser sans prendre de risques. La swastika est proscrite, la faucille et le marteau ornent encore les monuments, les murs et les drapeaux. Et la figure du « petit pĂšre des peuples » est, un peu partout, de retour.
Le reportage de la BBC dĂ©marre Ă lâentrĂ©e du mĂ©tro moscovite, station TaganskaĂŻa, oĂč un nouveau monument Ă la mĂ©moire de Joseph Staline a Ă©tĂ© inaugurĂ© mi-mai dans un couloir de correspondance entre deux lignes : il sâagit dâun imposant bas-relief de couleur claire, rĂ©alisĂ© dans le plus pur style fascisto-soviĂ©tique, qui montre des hommes, des femmes, des enfants, des bĂ©bĂ©s brandissant des bouquets en portant leurs regards Ă©namourĂ©s vers le noble visage du tyran. Lui-mĂȘme est reprĂ©sentĂ© debout, surmontĂ© dâune banderole Ă lâeffigie de LĂ©nine. Une insulte aux millions de victimes de soixante-dix ans de communisme Ă visage ouvertâŠ
Staline et lâURSS glorifiĂ©s en Russie Ă travers le souvenir de la Seconde Guerre mondiale
Il fut un temps oĂč il Ă©tait de bon ton de dĂ©crier Staline, ses crimes, ses exĂ©cutions sommaires, sa paranoĂŻa meurtriĂšre, ses purges et son mĂ©pris du peuple russe, pour mieux « sauver » le communisme lui-mĂȘme en dĂ©tendant ses liens avec le Goulag et autres atrocitĂ©s. Rosenberg rappelle que les statues de Staline avaient Ă©tĂ© renversĂ©es un peu partout aprĂšs sa mort, pendant quâon dĂ©nonçait ses crimes contre le peuple et que lâon « condamnait officiellement son culte de la personnalitĂ© ».
Sous Vladimir Poutine, câest la figure de Staline qui est volontiers rĂ©habilitĂ©e, saluĂ©e en tant que vainqueur de la bataille de Stalingrad et artisan de la victoire sur lâAllemagne nazie, qui a fait couler tant de sang russe â mais en marquant une distance Ă lâĂ©gard de LĂ©nine et du communisme lui-mĂȘme. La nouvelle Ćuvre qui lui rend hommage rompt avec cette dialectique en mettant Ă©galement LĂ©nine Ă lâhonneur.
Staline, lâhomme au millions de victimes est aujourdâhui donnĂ© en exemple et, comme le souligne Steve Rosenberg, des statues Ă son effigie ressurgissent un peu partout en Russie, en tant quâ« homme fort » Ă imiter.
Le journaliste a interviewĂ© plusieurs Moscovites, tel ce jeune homme qui explique ce quâil pense de Staline : « Eh bien, je pense que Joseph Staline est injustement dĂ©testĂ©. Il a beaucoup fait pour notre nation, et nous en profitons encore aujourdâhui. » Il y a eu a terreur stalinienne et de nombreuses personnes ont souffert dans les goulags, rĂ©pond le journaliste. « A ce sujet, nous ne pouvons pas blĂąmer uniquement Staline, car câĂ©tait un systĂšme », croit ce jeune.
Staline ? « Personne nâest parfait »
Une mĂ©nagĂšre de moins de cinquante ans explique quant Ă elle que Staline fait partie de lâhistoire de la Russie. Et les victimes du Goulag ? « Eh bien, ce sont des choses qui arrivent. Personne nâest parfait. SĂ»rement quâen ce temps-lĂ , il lui fallait le faire, et donc on a pris cette dĂ©cision. CâĂ©tait son choix. Nous, nous sommes dâaccord. »
Puis une jeune femme reconnaĂźt que Staline « Ă©tait, bien sĂ»r, un tyran. NĂ©anmoins il a prouvĂ© sa valeur en tant que chef. Une fois de plus, il y a du bon et du mauvais en chacun. Et quand vous rappelez la rĂ©pression, les temps difficiles des annĂ©es 1930, le culte de la personnalitĂ© de Staline, il sâagit Ă©videmment dâun chapitre triste de lâhistoire de notre pays⊠»
Essayez-donc de parler en des termes semblablement nuancĂ©s de Hitler, ou mĂȘme de Franco !
Ce retour en grĂące de Staline en cache peut-ĂȘtre un autre. Rosenberg lâaffirme sans dĂ©tours, en affirmant : « Mais il nây a pas que Joseph Staline qui revient sur le devant de la scĂšne. Seriez-vous prĂȘt Ă croire que câest lâURSS qui revient ? »
LâUnion soviĂ©tique, qui a aujourdâhui son musĂ©e Ă Moscou, cette URSS qui sâest effondrĂ©e il y a plus de trente ans, ne serait pas pour autant dĂ©truite. « II y a quelques jours, lâun des conseillers du prĂ©sident Poutine a suggĂ©rĂ© que lâURSS existait toujours lĂ©galement, car lors de sa dissolution, il y aurait eu des violations de procĂ©dure », rapporte Steve Rosenberg.
Celui-ci analyse, et montre, campĂ© au milieu de la Place Rouge, en quoi lâaffaire nâest pas le dĂ©lire de quelque individu : « Il a dĂ©clarĂ© cela pour tenter de faire passer la guerre de la Russie en Ukraine comme une affaire interne Ă Moscou. Puis un ancien Premier ministre russe est intervenu pour le soutenir, juste lĂ , prĂšs de la Place Rouge. Certains ultra-nationalistes sont dâaccord avec lui et souhaitent le retour de lâUnion soviĂ©tique. »
Le retour de lâURSS arrangerait bien la Russie
Rosenberg dit ne pas croire que « nous allons nous rĂ©veiller un matin et dĂ©couvrir que lâURSS est de retour, mais il est intĂ©ressant de voir que cette idĂ©e est semĂ©e et il est Ă©galement intĂ©ressant de voir comment le passĂ© est rĂ©interprĂ©tĂ© et remodelĂ© ici sous lâinfluence des Ă©vĂ©nements actuels, de la guerre en Ukraine, de la confrontation avec lâOccident et de la promotion du patriotisme ».
Le proche de Poutine citĂ© par le journaliste est Anton Kobyakov qui a revendiquĂ© la survie juridique de lâURSS lors du 13e Forum juridique international de Saint-PĂ©tersbourg le 21 mai dernier, câest-Ă -dire dans le contexte dâune rencontre officielle, puisque le Forum a Ă©tĂ© créé Ă lâinitiative du ministĂšre russe de la Justice en 2011 avec le soutien du prĂ©sident de la FĂ©dĂ©ration russe â Vladimir Poutine lui a dâailleurs adressĂ© un message de fĂ©licitations et dâencouragements cette annĂ©e.
On ne sache pas que les affirmations de Kobyakov, conseiller de Poutine, aient Ă©tĂ© contredites, dĂ©menties ou discrĂ©ditĂ©es dans cette Russie oĂč il nâest certes pas possible de dire ce qui vous passe par la tĂȘte Ă ce niveau. Au contraire, elles ont Ă©tĂ© rĂ©percutĂ©es par lâagence dâinformations officielle TASS. Selon ses mots, « la procĂ©dure de dissolution de lâURSS nâa pas Ă©tĂ© respectĂ©e » â mieux, « les spĂ©cialistes du droit constitutionnel, y compris ceux des pays occidentaux tels que les Etats-Unis et la France » lâauraient reconnu.
LâURSS pas morte ? Des proches de Poutine veulent le faire croire
Sur TF1-Info, Astrig Agopian consacre un article Ă cette revendication que lâon peut tenir pour absurde⊠ou lourde de consĂ©quences. Elle Ă©crit : « Ce proche du Kremlin prĂ©tend que lâaccord de Minsk, signĂ© en 1991, et considĂ©rĂ© comme le document qui entĂ©rine la dislocation de lâUnion soviĂ©tique est âcontestableâ et que âla procĂ©dure lĂ©gale nâa pas Ă©tĂ© correctement suivieâ. Kobyakov conclut mĂȘme Ă propos de la guerre en Ukraine que âsi lâUnion soviĂ©tique nâa pas Ă©tĂ© lĂ©galement dissoute, alors la crise ukrainienne, par exemple, pourrait ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme une affaire intĂ©rieure plutĂŽt quâun conflit internationalâ. »
Pourquoi faire compliquĂ© quand on peut faire simple, en somme ? Sans compter quâune URSS revenue non comme un fantĂŽme, mais revivifiĂ©e comme une belle au bois dormant ne cadrerait pas si mal avec la rĂ©habilitation actuelle de lâhistoire soviĂ©tique elle-mĂȘme, avec le maintien de sympathies communistes de toujours (pensez aux liens de la Russie avec la Chine, la CorĂ©e du Nord et bien dâautres alliĂ©s et anciens « pays non-alignĂ©s », comme au temps de la Guerre froide) et lâorganisation dâĂ©vĂ©nements oĂč les jeunesses communistes du monde entier sont Ă lâhonneurâŠ
Dâailleurs, Kobyakov nâest pas seul Ă penser que lâURSS existe toujours pleinement en tant quâentitĂ© juridique. Lâancien Premier ministre russe SergueĂŻ Stepachine (il occupa la fonction en 1999) est du mĂȘme avis, et il lâa exprimĂ© quelques jours plus tard lors dâun entretien avec Ria Novosti.
Lâarticle dâAstrig Agopian donne ensuite la parole Ă des constitutionnalistes et Ă des historiens français ou russes, qui ne croient pas en la justesse du raisonnement tenu par Kobyakov et Stepachine. Elle souligne que ce courant de pensĂ©e a Ă©tĂ© historiquement celui des opposants, citant lâhistorien Ilya Platov : « Ces paroles rĂ©sonnent Ă©trangement avec le discours tenu par un mouvement plutĂŽt marginal et considĂ©rĂ© comme extrĂ©miste du retour en URSS, qui disait justement que lâUnion avait Ă©tĂ© dissoute illĂ©galement, que la FĂ©dĂ©ration de Russie est une entreprise privĂ©e, et qui appelait ses membres Ă ne plus payer leurs impĂŽts, qui remettait en cause la lĂ©gitimitĂ© de Vladimir Poutine en tant que prĂ©sident de la FĂ©dĂ©ration de Russie. Les dirigeants de ce mouvement ont Ă©tĂ© emprisonnĂ©s. Câest donc assez curieux quâun conseiller de Vladimir Poutine dise la mĂȘme chose. »
Le retour de la Russie prédit par un transfuge du KGB
Mais ne sâagit-il que dâune argumentation stratĂ©gique et dâun raisonnement de circonstance alors que la Russie cherche Ă justifier juridiquement ses actions contre lâUkraine ? Ou dâune maniĂšre, comme le dit Platov, « dâĂ©veiller la nostalgie soviĂ©tique, de rassurer sur sa puissance » ?
Un autre objectif se cache peut-ĂȘtre derriĂšre lâargutie juridique. Ceux qui croient, ayant lu Des mensonges pas si nouveaux du transfuge du KGB Anatoliy Golitsyn, que lâUnion soviĂ©tique nâest jamais morte, y verront plutĂŽt le signe que lâidĂ©e de la ranimer existe bel et bien chez certains â et ce, quoi quâil en soit de lâexactitude juridique du propos.
Golitsyn annonçait dĂšs le dĂ©but des annĂ©es 1980, parmi dâautres prĂ©dictions qui se sont rĂ©alisĂ©es, la chute de lâURSS, lâapparente libĂ©ralisation de la Russie et son rapprochement avec lâOccident en attendant la nouvelle « RĂ©volution dâoctobre » communiste qui sâaccomplirait Ă travers un Nouvel Ordre Mondial.
Avec une URSS prĂȘte au rĂ©emploi, bien des Ă©tapes pourraient ĂȘtre brĂ»lĂ©es.
Jeanne Smits
05/06/2025
1. Le "Plan Libéral" : Une Menace pour le Christianisme et la Nation
Orbån décrit le "plan libéral" comme une force qui cherche à éradiquer les fondements historiques et culturels de l'Europe.
Rejet du Christianisme et de l'identité nationale : Selon Orbån, les libéraux considÚrent la "vieille Europe culturelle et chrétienne comme obsolÚte". Leur objectif est de "fabriquer une nouvelle identité pour remplacer le christianisme et la nation". Il rappelle que les efforts pour remplacer le christianisme existent depuis plus d'un siÚcle, citant la Révolution française et les mouvements de gauche en Russie, en Espagne et au Portugal, bien que les méthodes récentes soient plus "culturelles" (ex: "libération sexuelle" et idéologie LGBTQ).
Affaiblissement de la souveraineté nationale : Le plan libéral vise à "saper la souveraineté nationale et à centraliser l'Europe". Orbån critique Bruxelles (siÚge de l'OTAN) comme le moteur de cette centralisation.
Ăconomie de guerre et centralisation : Il accuse les libĂ©raux d'utiliser la guerre comme prĂ©texte pour construire un nouveau modĂšle Ă©conomique. "S'il y a la guerre, il y a plus de Bruxelles, et encore moins de souverainetĂ©." Ce modĂšle est caractĂ©risĂ© par "une dette collective, un contrĂŽle central et un trĂ©sor de guerre".
L'adhésion de l'Ukraine à l'UE : L'intégration de l'Ukraine dans l'Union européenne est perçue comme un élément "clé" de ce "plan libéral belliciste", potentiellement un pas vers l'OTAN, ce que la Russie a jugé comme une menace de guerre nucléaire.
"L'Ătat profond transatlantique" : OrbĂĄn appelle au "dĂ©mantĂšlement de la collusion libĂ©rale amĂ©ricaine et bruxelloise, l'Ătat profond transatlantique".
2. Le "Plan Patriotique" : L'Alternative Conservatrice
En opposition, Viktor OrbĂĄn propose un "plan patriotique" en quatre points pour l'Europe :
Paix : Le maintien de la paix est une priorité.
Souveraineté nationale : La préservation et le renforcement de la souveraineté des nations européennes.
Liberté : Bien que non explicitement définie, cela sous-entend la liberté individuelle et nationale face à l'ingérence extérieure et à la centralisation.
Retour à l'Europe chrétienne : Il s'agit de se réapproprier la culture chrétienne pour faire reculer la barbarie qui se développe (ndlr : en France, on est servi !). Cela implique une politique anti-immigration stricte.
3. Le RĂŽle du Christianisme et de la Famille
MĂȘme sâil nâest pas catholique,OrbĂĄn est un fervent dĂ©fenseur des valeurs chrĂ©tiennes :
Il promeut "une défense sans réserve du mariage et de l'unité familiale traditionnelle" et s'oppose ouvertement à l'idéologie LGBTQ.
Bien que la pratique religieuse hebdomadaire en Hongrie reste faible (9%, 4 fois plus quâen France), la part de ceux qui n'assistent jamais aux services religieux a diminuĂ© ces derniĂšres annĂ©es.
4. L'Appel à l'Action et au Soutien Américain
OrbĂĄn estime que le "plan patriotique" doit l'emporter et que cette bataille doit ĂȘtre gagnĂ©e "d'abord par chacun chez soi, puis ensemble Ă Bruxelles". Il insiste sur la nĂ©cessitĂ© du soutien des Ătats-Unis, et en particulier d'une "administration rĂ©ussie du PrĂ©sident Trump", pour contrer l'influence libĂ©rale.
En somme, le discours de Viktor Orbån dépeint une Europe à la croisée des chemins, entre une voie libérale perçue comme destructrice de l'identité chrétienne et nationale, et une voie patriotique axée sur la souveraineté, la paix et la restauration des valeurs traditionnelles.
Chers amis catholiques, ce que dit Orban est une évidence pour tous. Qui ne voit pas la volonté mortifÚre de la plupart de nos gouvernants européens de désagréger les sociétés ?
Qui ose le dire de crainte de passer pour âcomplotisteâ ? Alors, quand câest le dirigeant dâune nation martyre du communisme qui proclame ces vĂ©ritĂ©s, c'est Ă dire qu'il connaĂźt le sujet, on ne boudera pas notre plaisir.
Kyrie Eleison !
François Charbonnier
Sources : LifeSiteNews, About Hungary
04/06/2025
CoĂŻncidant avec le lancement de l'Observatoire Français du Catholicisme (OFC), cette enquĂȘte dresse un portrait nuancĂ© d'une sociĂ©tĂ© en quĂȘte de sens, tout en soulignant les dĂ©fis auxquels l'Ăglise catholique est confrontĂ©e.
Une Spiritualité Bien Vivante en France
Contrairement aux idĂ©es reçues, l'univers spirituel et religieux semble habiter davantage l'intimitĂ© des citoyens français qu'on ne le pensait. Les chiffres parlent d'eux-mĂȘmes : 37% des Français dĂ©clarent ĂȘtre en « quĂȘte spirituelle », et plus de la moitiĂ© (52%) s'adonnent Ă la priĂšre ou Ă la mĂ©ditation, « souvent ou parfois ». Cette aspiration ne se limite pas aux gĂ©nĂ©rations plus ĂągĂ©es ; les jeunes sont Ă©galement concernĂ©s, avec deux tiers des 18-24 ans qui aspirent Ă plus de « silence », de « contemplation » et de « mĂ©ditation ». Un quart de la population exprime le dĂ©sir de « temps de retraite en silence », un autre quart souhaite « ĂȘtre guidĂ© », et un pourcentage similaire voudrait un accĂšs plus facile Ă des lieux de recueillement comme les Ă©glises ou chapelles.
Cependant, cette quĂȘte spirituelle est loin d'ĂȘtre uniforme dans ses objets. Si 46% s'adressent à « Dieu », une part significative s'oriente vers des figures plus spĂ©cifiques comme la « Vierge Marie » (19%) ou « JĂ©sus-Christ » (18%). Fait notable, 18% ne s'adressent à « personne en particulier », tandis que d'autres se tournent vers le « cosmos » (8%) ou « des saints » (5%). Cette diversitĂ© souligne une spiritualitĂ© qui dĂ©borde largement le cadre des institutions religieuses traditionnelles.
L'OFC : Un Nouvel Outil pour Comprendre les Mutations
C'est dans ce contexte de profonds changements que l'Observatoire Français du Catholicisme (OFC) voit le jour. Cet institut, qui se dĂ©clare « une organisation indĂ©pendante et autonome » financĂ©e par une « pluralitĂ© de mĂ©cĂšnes privĂ©s » (dont le Fonds du Bien Commun), a pour mission d'« Ă©clairer des rĂ©alitĂ©s et tendances de fond qui traversent l'Ăglise catholique en France et la sociĂ©tĂ© française ». L'objectif est clair : fournir des « donnĂ©es fiables » et des « analyses et des prospectives » pour aider le catholicisme Ă naviguer cette « pĂ©riode de profondes mutations » et repĂ©rer les « points dâinteractions » entre la sociĂ©tĂ© et l'Ăglise.
Ghislain Lafont, prĂ©sident de l'OFC, insiste sur l'indĂ©pendance de l'observatoire. De son cĂŽtĂ©, Mgr Bruno Valentin, Ă©vĂȘque de Carcassonne et de Narbonne, souligne l'importance cruciale de cette initiative : « Lâenjeu me paraĂźt trĂšs important, car le paysage religieux français est en pleine mutation. Il est essentiel de lâobserver et de le comprendre ». Les travaux de l'OFC, qui seront disponibles en « open source », s'adresseront Ă un large public, des « dĂ©cideurs ecclĂ©siaux comme civils » aux « acteurs engagĂ©s sur le terrain et aux chercheurs et universitaires ».
L'Ăglise Catholique Face Ă Ses DĂ©fis
Si la spiritualitĂ© en France semble en pleine Ă©bullition, l'Ăglise catholique doit faire face Ă des dĂ©fis majeurs, rĂ©vĂ©lĂ©s par le mĂȘme sondage. L'image des prĂȘtres catholiques a subi une dĂ©gradation significative : seulement 52% des Français les jugent « dignes de confiance », contre 68% il y a huit ans. Cette Ă©rosion de la confiance est directement liĂ©e aux scandales d'abus sexuels, qui sont mentionnĂ©s dans la moitiĂ© des reproches adressĂ©s Ă l'Ăglise.
Sur le plan dĂ©mographique, le catholicisme en France est en mutation. Bien que 46% des Français se dĂ©clarent toujours catholiques, cette proportion cache une forte disparitĂ© gĂ©nĂ©rationnelle. 62% des plus de 65 ans se reconnaissent dans cette confession, mais ce chiffre chute drastiquement Ă seulement 23% chez les 18-24 ans. Ă titre de comparaison, 18% des jeunes de cette mĂȘme tranche d'Ăąge se disent musulmans. Quant Ă la pratique religieuse, elle reste marginale : seuls 2% des baptisĂ©s catholiques assistent Ă la messe chaque dimanche. Pour Arnaud BouthĂ©on, laĂŻc catholique reconnu, ces chiffres ne disent pas tout : « Le catholicisme nous dĂ©passe, il est multiple, divers. On ne peut le rĂ©duire Ă des chiffres et des donnĂ©es. Tant de choses se passent et se dĂ©cantent dans les cĆurs. »
L'Ă©tude et le lancement de l'OFC nous offrent un tableau complexe et fascinant de la spiritualitĂ© en France. Loin d'une sĂ©cularisation monolithique, le pays rĂ©vĂšle une aspiration profonde au sens, qui s'exprime sous des formes variĂ©es. L'Ăglise catholique, bien que confrontĂ©e Ă des dĂ©fis majeurs liĂ©s Ă son image et Ă sa dĂ©mographie, est appelĂ©e Ă comprendre et Ă s'adapter Ă ces mutations pour mieux interagir avec une sociĂ©tĂ© en quĂȘte spirituelle. L'OFC, avec sa dĂ©marche d'analyse et de mise Ă disposition des donnĂ©es, pourrait bien ĂȘtre un outil essentiel pour Ă©clairer les chemins de la foi et de la spiritualitĂ© dans la France de demain.
Comment l'Ăglise catholique saura-t-elle rĂ©pondre Ă cette quĂȘte spirituelle diffuse mais forte, au-delĂ des dĂ©fis actuels ?
Saura-t-elle enfin cesser de se contenter dâĂȘtre une ONG des bons sentiments, de relancer elle-mĂȘme des conflits sur la liturgie, de sortir de la pastorale de lâenfouissement ?
En gros, de nous montrer le Chemin, de proclamer la Vérité et de nous donner la Vie ?
François Charbonnier
Sources : Le Figaro, La Vie
03/06/2025
Câest ce qui advint : il distribua ses biens aux pauvres et sâinstalla Ă Naples pour sây prĂ©parer au sacerdoce. OrdonnĂ© prĂȘtre en 1587, il entra dans la compagnie des Bianchi (« les Blancs »), vouĂ©e au soutien spirituel des prisonniers ; il se dĂ©voua auprĂšs des pauvres et des malades.
Un jour, il reçut et lut par erreur une lettre adressĂ©e Ă un autre par deux hommes voulant former une nouvelle sociĂ©tĂ© de religieux ; voyant en cet Ă©pisode un signe de la Providence, il sâassocia Ă ce projet. Câest ainsi quâil devint lâun des fondateurs de lâordre des Clercs rĂ©guliers mineurs, dont les statuts furent approuvĂ©s en 1588 par Sixte V. En plus des trois vĆux ordinaires, ces religieux ajoutĂšrent celui de ne rechercher aucune dignitĂ©, sauf Ă la demande du pape.
Ascanio fit sa profession religieuse le 9 avril 1589, et prit le nom de François. Il devint supĂ©rieur gĂ©nĂ©ral en 1591 et diffusa son institut en Italie et en Espagne. Il pratiquait le jeĂ»ne et la pĂ©nitence, Ă©tait dâune grande humilitĂ©, et fut un exemple de saintetĂ© pour bon nombre de disciples.
AprĂšs avoir prononcĂ© ces derniĂšres paroles : « Allons, allons au Ciel ! », François mourut le 4 juin 1608, Ă Agnone, dans le centre de lâItalie, oĂč il sâĂ©tait rendu pour Ă©tablir une nouvelle fondation. Il fut canonisĂ© par Pie VII en 1807.
03/06/2025
« Quand le Dieu des armées te donnant la victoire
Tu chassas l'étranger et fis sacrer le roi
Jeanne, ton nom devint célÚbre dans l'histoire
Nos plus grands conquérants pùlirent devant toi.
Mais ce n'était encor qu'une gloire éphémÚre
Il fallait à ton nom l'auréole des Saints
Aussi le Bien-Aimé t'offrit sa coupe amÚre
Et tu fus comme Lui rejetée des humains.
Au fond d'un noir cachot, chargée de lourdes chaßnes
Le cruel étranger t'abreuva de douleurs
Pas un de tes amis ne prit part Ă tes peines
Pas un ne s'avança pour essuyer tes pleurs.
Jeanne tu m'apparais plus brillante et plus belle
Qu'au sacre de ton roi, dans ta sombre prison.
Ce céleste reflet de la gloire éternelle
Qui donc te l'apporta ? Ce fut la trahison.
Ah ! si le Dieu d'amour en la vallée des larmes
N'était venu chercher la trahison, la mort
La souffrance pour nous aurait été sans charmes
Maintenant nous l'aimons, elle est notre trésor. »
02/06/2025
Le site internet du Vatican a fait peau neuve, et la premiĂšre chose que lâon remarque en ouvrant sa premiĂšre page, celle consacrĂ©e au pape actuel, LĂ©on XIV, est un lien vers son principal chapitre : « Magisterium » â le magistĂšre. Les actualitĂ©s ont migrĂ© sous dâautres nouvelles rubriques : celles concernant lâannĂ©e jubilaire, le rĂ©seau mondial de priĂšre du pape, la page de demande de billets pour les audiences et cĂ©lĂ©brations papales et le denier de Saint-Pierre. Et câest tout un symbole : ce pape veut dâabord enseigner. Non pas Ă©couter la base â câĂ©tait tout le sens de la synodalitĂ© selon François â mais lui dire ce quâil faut croire, espĂ©rer et faire pour obtenir le salut ? Cela commence Ă y ressembler fort, et ce seul glissement surprend aprĂšs douze ans qui ont largement fait penser Ă une pĂ©nible traversĂ©e du dĂ©sert.
Ces derniers jours LĂ©on XIV a pris la parole Ă de multiples reprises ; deux interventions retiennent particuliĂšrement lâattention, celle par laquelle il a marquĂ© le centenaire de la canonisation des saints Jean-Eudes, Jean-Marie Vianney et ThĂ©rĂšse de lâEnfant-JĂ©sus et de la Sainte Face dans un message aux Ă©vĂȘques de France, et son homĂ©lie Ă lâoccasion du jubilĂ© des familles, dans laquelle il a citĂ© Humanae vitae.
LĂ©on XIV met du baume au cĆur de la France
En tournant son regard vers la France, moins dâun mois aprĂšs son Ă©lection le 8 mai dernier, le pape panse assurĂ©ment une blessure. MĂȘme si son prĂ©dĂ©cesseur immĂ©diat sâest rendu plusieurs fois dans les « pĂ©riphĂ©ries » de lâHexagone â mais en assurant quâen rendant visite Ă Marseille, il nâallait « pas en France » â il semblait y avoir de sa part une sourde hostilitĂ© Ă lâĂ©gard de la fille aĂźnĂ©e de lâEglise que Jean-Paul II interpella douloureusement jadis en lui demandant ce quâelle avait fait des promesses de son baptĂȘme. Et si LĂ©on XIV a bien citĂ© le pape François, câest pour rappeler ce quâil appelle son « testament » : son encyclique sur le SacrĂ©-CĆur.
LĂ©on XIV, de lignĂ©e française par son pĂšre et dâune mĂšre aux ascendances crĂ©oles, et donc française elle aussi, nâa pas tardĂ© Ă envoyer un message Ă la ConfĂ©rence des Ă©vĂȘques de France et il lâa fait non pas en sâappuyant sur lâactualitĂ© ou en abordant une question « sociĂ©tale » de notre temps : il a parlĂ© de la saintetĂ© et de la nĂ©cessaire grĂące de Dieu quâil faut pour lâobtenir.
Il a invitĂ© les Ă©vĂȘques à « donner un relief particulier Ă cet anniversaire » en rappelant que ces grands saints sont « des maĂźtres Ă Ă©couter⊠des modĂšles Ă imiter⊠de puissants soutiens Ă prier et Ă invoquer » devant « lâampleur des dĂ©fis qui se prĂ©sentent Ă la France ».
« Lâhistoire de France aurait pu faire lâĂ©conomie de beaucoup de gĂ©nĂ©raux, de rois, et de ministres : elle nâaurait pas pu se passer de ses saints », disait Henri Pourrat : câest cette vĂ©ritĂ©-lĂ que LĂ©on XIV a rappelĂ©e Ă la France avant quâil ne soit question de quoi que ce soit dâautre, et par les temps qui courent câest Ă la fois inattendu et bousculant. Du style : « Cherchez dâabord le royaume de Dieu, et le reste vous sera donnĂ© par surcroĂźt. »
Ces saints de France plus indispensables que des généraux,
des rois et des ministres
Jean-Eudes, le curĂ© dâArs, la petite ThĂ©rĂšse « ont aimĂ© sans rĂ©serve JĂ©sus de maniĂšre simple, forte et authentique ; ils ont fait lâexpĂ©rience de sa bontĂ© et de sa tendresse dans une particuliĂšre proximitĂ© quotidienne, et ils en ont tĂ©moignĂ© dans un admirable Ă©lan missionnaire », souligne le pape.
De chacun, il rappelle un trait particulier. Saint Jean-Eudes â ce grand saint de lâEucharistie â « nâest-il pas le premier Ă avoir cĂ©lĂ©brĂ© le culte liturgique des CĆurs de JĂ©sus et de Marie ; Saint Jean Marie Vianney nâest-il pas ce curĂ© passionnĂ©ment donnĂ© Ă son ministĂšre qui affirmait : âLe sacerdoce, câest lâamour du cĆur de JĂ©susâ ; et enfin, Sainte ThĂ©rĂšse de lâEnfant JĂ©sus et de la Sainte Face nâest-elle pas le grand Docteur en scientia amoris dont notre monde a besoin, elle qui ârespiraâ Ă chaque instant de sa vie le Nom de JĂ©sus, avec spontanĂ©itĂ© et fraicheur, et qui enseigna aux plus petits une voie âtoute facileâ pour y accĂ©der ? »
Quand ce pape parle des saints, câest pour faire converger le regard des Ăąmes vers JĂ©sus, et pour montrer quâIl est lâauteur de leur saintetĂ©.
« CĂ©lĂ©brer le centenaire de canonisation de ces trois Saints, câest dâabord une invitation Ă rendre grĂące au Seigneur pour les merveilles quâil a accomplies en cette terre de France durant de longs siĂšcles dâĂ©vangĂ©lisation et de vie chrĂ©tienne. Les Saints nâapparaissent pas spontanĂ©ment mais, par la grĂące, surgissent au sein de CommunautĂ©s chrĂ©tiennes vivantes qui ont su leur transmettre la foi, allumer dans leur cĆur lâamour de JĂ©sus et le dĂ©sir de le suivre. Cet hĂ©ritage chrĂ©tien vous appartient encore, il imprĂšgne encore profondĂ©ment votre culture et demeure vivant en bien des cĆurs », Ă©crit LĂ©on XIV.
Le nouveau style de Léon XIV rappelle des souvenirs oubliés
Pourquoi cette impression de recevoir du pain, et non des pierres ?
Pourquoi ce parfum dâespĂ©rance, lorsque le pape Ă©crit : « Câest pourquoi je forme le vĆu que ces cĂ©lĂ©brations ne se contentent pas dâĂ©voquer avec nostalgie un passĂ© qui pourrait sembler rĂ©volu, mais quâelles rĂ©veillent lâespĂ©rance et suscitent un nouvel Ă©lan missionnaire. Dieu peut, moyennant le secours des saints quâIl vous a donnĂ©s et que vous cĂ©lĂ©brez, renouveler les merveilles quâIl a accomplies dans le passĂ©. Sainte ThĂ©rĂšse ne sera-t-elle pas la Patronne des missions dans les contrĂ©es mĂȘmes qui lâont vu naĂźtre ? Saint Jean-Marie Vianney et Saint Jean Eudes ne sauront-ils pas parler Ă la conscience de nombreux jeunes de la beautĂ©, de la grandeur et de la fĂ©conditĂ© du sacerdoce, en susciter le dĂ©sir enthousiaste, et donner le courage de rĂ©pondre gĂ©nĂ©reusement Ă lâappel, alors que le manque de vocations se fait cruellement sentir dans vos diocĂšses et que les prĂȘtres sont de plus en plus lourdement Ă©prouvĂ©s ? »
On en retient ceci : les merveilles que Dieu a accomplies Ă travers ces grands saints français ont Ă©tĂ© donnĂ©es gratuitement et ont pu sâĂ©panouir dans le terrain fertile de la chrĂ©tientĂ© ; elles semblent ĂȘtre le fait dâun passĂ© lointain, renvoyer vers un temps oĂč le manque de vocations ne se faisait pas « cruellement sentir » ; mais ce vide nâest pas total, la foi, la grĂące, les vocations peuvent refleurir par lâintercession de ces grandes figures qui peuvent toujours demander et laisser passer le don de Dieu.
Et oui, on se sent revigorĂ© â Ă commencer par les longues colonnes qui pĂ©rĂ©grineront sur les routes de Chartres Ă la PentecĂŽte â en lisant : « Jâinvoque lâintercession de Saint Jean Eudes, de Saint Jean-Marie Vianney et de Sainte ThĂ©rĂšse de lâEnfant JĂ©sus et de la Sainte Face, pour votre pays et pour le Peuple de Dieu qui y pĂ©rĂ©grine courageusement, sous les vents contraires et parfois hostiles de lâindiffĂ©rentisme, du matĂ©rialisme et de lâindividualisme. Quâils redonnent courage Ă ce Peuple, dans la certitude que le Christ est vraiment ressuscitĂ©, Lui, le Sauveur du monde. »
Catholiques et français toujours : câest Ă croire que le pape LĂ©on XIV y croit.
Quand Léon XIV parle aux familles, il rappelle la nécessité de la grùce
Lorsquâil sâest exprimĂ©, trois jours plus tard, devant la foule des familles, des enfants, des grands-parents et des personnes ĂągĂ©es venus pour leur jubilĂ©, on a eu cette mĂȘme impression⊠catholique. LĂ©on XIV a rappelĂ© que lâunitĂ©, la vraie, « est (âŠ) une communion fondĂ©e sur lâamour mĂȘme dont Dieu aime, dâoĂč viennent la vie et le salut » : « En tant que telle, elle est avant tout un don que JĂ©sus vient apporter. » En donnant Ă lâhomme la possibilitĂ© de participer Ă cet amour. « Ecoutons avec admiration ces paroles : JĂ©sus nous rĂ©vĂšle que Dieu nous aime comme Il sâaime Lui-mĂȘme. Le PĂšre ne nous aime pas moins quâIl nâaime son Fils unique, câest-Ă -dire infiniment. Dieu nâaime pas moins, parce quâIl aime dâabord, Il aime le premier ! » En parlant aux familles, le pape parle avant tout et dâabord de la plus infinie des communions dâamour : celle de la sainte TrinitĂ©.
LĂ©on XIV ne laisse pas de doute : câest la famille selon la volontĂ© de Dieu quâil sâagit de chĂ©rir et de dĂ©fendre. « Nâoublions pas : câest dans les familles que se construit lâavenir des peuples. » Sans elles, il nây a donc pas dâavenir. Et il ajoute, ayant donnĂ© lâexemple de couples canonisĂ©s : « En dĂ©signant comme tĂ©moins exemplaires des Ă©poux, lâEglise nous dit que le monde dâaujourdâhui a besoin de lâalliance conjugale pour connaĂźtre et accueillir lâamour de Dieu et surmonter, par sa force qui unifie et rĂ©concilie, les forces qui dĂ©sagrĂšgent les relations et les sociĂ©tĂ©s. »
Et il a mĂȘme dĂ©clarĂ© : « Câest pourquoi, le cĆur plein de reconnaissance et dâespĂ©rance, je vous dis, Ă vous les Ă©poux : le mariage nâest pas un idĂ©al, mais la norme du vĂ©ritable amour entre lâhomme et la femme : un amour total, fidĂšle, fĂ©cond (cf. Saint Paul VI, Lettre encyclique Humanae vitae, 9). Tout en vous transformant en une seule chair, cet amour vous rend capables, Ă lâimage de Dieu, de donner la vie. »
Les mots ont du poids. On sait bien que beaucoup ont prĂ©tendu que le mariage chrĂ©tien est un « idĂ©al » vers lequel on tend, si difficile quâon a bien droit Ă la « loi de gradualitĂ© » pour en rester un peu ou beaucoup Ă lâĂ©cart. LĂ©on XIV Ă©carte cette erreur, et rappelle que le mariage exige que lâamour des Ă©poux soit « total, fidĂšle, fĂ©cond », parce quâil est par nature indissoluble et ouvert Ă la vie.
Le pape cite Humanae vitae moins de quatre semaines aprÚs son élection
Nul ne sait comment évoluera le pontificat de Léon XIV. Mais il nous aura donné déjà cette lumiÚre, des conseils qui sonnent vrai, exprimés avec sobriété et élégance :
« Câest pourquoi je vous encourage Ă ĂȘtre, pour vos enfants, des exemples de cohĂ©rence, en vous comportant comme vous voulez quâils se comportent, en les Ă©duquant Ă la libertĂ© par lâobĂ©issance, en recherchant toujours en eux le bien et les moyens de le faire grandir. Et vous, enfants, soyez reconnaissants envers vos parents : dire âmerciâ pour le don de la vie et pour tout ce qui nous est donnĂ© chaque jour avec elle, câest la premiĂšre maniĂšre dâhonorer son pĂšre et sa mĂšre (cf. Ex 20, 12). Enfin, Ă vous, chers grands-parents et personnes ĂągĂ©es, je recommande de veiller sur ceux que vous aimez, avec sagesse et compassion, avec lâhumilitĂ© et la patience que les annĂ©es enseignent.
« Dans la famille, la foi se transmet avec la vie, de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration : elle est partagĂ©e comme la nourriture sur la table et les affections du cĆur. Cela en fait un lieu privilĂ©giĂ© pour rencontrer JĂ©sus, qui nous aime et veut notre bien, toujours. »
Merci, Saint-PĂšre !