Le blog du Temps de l'Immaculée.
16/11/2025
L'Église en France observe une tendance encourageante, mais complexe : de plus en plus de jeunes adultes demandent le baptême, mais un nombre significatif d'entre eux ne persévère pas dans la vie chrétienne par la suite. Face à cette "désaffection" post-baptême, les pasteurs s'interrogent. Pour y répondre, une grande consultation des évêques d’Île-de-France est prévue en 2026-2027, précédée par un colloque pour les prêtres de toute la France en novembre. Selon l'Abbé Henri Vallançon, co-organisateur de l'événement, interrogé par Aymeric Pourbaix dane France Catholique, la solution réside dans une réforme fondamentale du catéchuménat : il ne doit plus être une simple "préparation au baptême" basé sur l'émotion, mais une "préparation à la vie chrétienne" ancrée dans la doctrine, la morale et la perspective du Salut éternel.
L'Abbé Vallançon insiste sur le fait que le manque de persévérance n'est pas une fatalité générationnelle, mais le résultat d'une pédagogie de catéchuménat à revoir. L'erreur principale, selon lui, est de faire du baptême un "temps fort" émotionnel et extraordinaire. Cette "pédagogie du temps fort" mène inévitablement à une désillusion lorsque la vie chrétienne ordinaire s'installe, caractérisée par des périodes de "sécheresse spirituelle" (comme l'enseignent les maîtres du Carmel).
Pour contrecarrer cela, la nouvelle orientation pastorale devrait :
1. Déplacer la Focalisation : Le baptême n'est qu'un moyen vers le Salut. Toute la pastorale doit être orientée vers la préparation à la vie chrétienne en vue de la Vie éternelle, ce qui implique de vivre selon la loi de Dieu et de rejeter le péché mortel.
2. Renforcer la Doctrine : Sans une formation doctrinale et morale solide, la foi se réduit à une expérience et des sentiments "volatils". Il est essentiel de nourrir l'intelligence des convertis par un enseignement doctrinal pour les ancrer profondément dans le Christ.
3. Insister sur la Pénitence : Le repentir des fautes passées est trop souvent sous-estimé. Il faut inviter les catéchumènes à une relecture de vie et au regret de leurs péchés en préparation du baptême, qui est la mort au péché et la résurrection dans le Christ.
4. Affirmer les Exigences Morales : Les convertis doivent être avertis que la société (relativisme, hédonisme) fait obstacle à la foi. En particulier, les couples non mariés doivent célébrer leur mariage immédiatement après le baptême — ou différer le sacrement — pour vivre réellement dans l'état de grâce et ne pas "brader les exigences du Christ."
5. Valoriser le Lien Personnel à Dieu : Pour les néophytes (déjà baptisés), il est crucial de construire d'abord une relation profonde avec le Christ. C'est ce lien personnel qui les poussera à s'intégrer dans la paroisse et à accepter les inévitables déceptions de la vie communautaire.
En somme, l'urgence pour l'Église est de sortir d'un catéchuménat qui prépare à un événement, pour entrer dans un processus qui prépare à une vie de persévérance. La pédagogie de l'Évangile n'est pas celle de l'émotion passagère, mais celle de la fidélité ordinaire, ancrée dans la doctrine, la prière, les sacrements, et vécue dans la perspective des fins dernières. L'enjeu n'est pas la communauté, ni le sacrement lui-même, mais bien le Salut.
Pour compléter cet article, je vous ajoute ci-après le commentaire de bon sens d'un participant du Forum Catholique sur cet article de France Catholique :
Je note les excellentes intuitions de l’abbé Vallançon qui me paraissent en grande partie en phase avec ce que je peux observer à mon niveau. Il y aurait bien sûr beaucoup d’autres points à évoquer.
On a effectivement parfois tendance à en faire trop sur l’intégration dans la vie communautaire. Tous les néophytes ne sont pas forcément demandeurs dans ce domaine, loin de là. Simplement, ceux qui ont besoin de soutien de la communauté doivent le trouver au moment où ils en ont besoin. Les déceptions dans ce domaine peuvent hélas faire des dégâts.
Je pense aussi qu’il faut insister sur non seulement l’obligation, mais même la nécessité absolue de la présence à la messe dominicale.
Chaque catéchumène fermement engagé dans la voie du baptême doit savoir que désormais, quelque soient les difficultés, doutes, questionnements qu’il traversera durant sa vie, il assistera à la messe chaque dimanche, même s’il se trouve dans un état où il ne peut communier. Ce qui peut arriver et arrivera dans la plupart des cas durant des périodes plus ou moins longues, et c’est la marge de « respiration » dans la vie chrétienne qu’il faut permettre. En effet certains commandements peuvent nécessiter beaucoup du temps et de la maturité humaine pour pouvoir être observés avec régularité, surtout dans la société actuelle. L’acquisition de certaines vertus s’effectue sur le temps long et chaque fidèle soit se sentir libre d’avancer à son rythme. Cela signifie sortir de l’idéologie (récente) de la « communion fréquente » (comprendre: systématique) et insister dans ce domaine sur la qualité plus que sur la quantité/systématicité. Avant le XXe siècle on ne communiait que rarement, en tout cas pas tous les dimanches, et ce n’était pas seulement un fruit d’une dérive janséniste (saint Louis IX par exemple ne communiait que cinq ou six fois dans l’année!).
Mais en cas de « nuit des sens » ou de crise spirituelle prolongée, entendre la Parole de Dieu et assister au saint sacrifice au moins le dimanche est le dernier lien qui ne doit être rompu à aucun prix, et qu’il faut conserver toute la vie, chaque jour, jusqu’à la mort.
Je note aussi avec tristesse que même dans les milieux très pratiquants on n’apprend plus aux fidèles l’art de la prière et qu’il n’y ait pas de réelle formation à la vie spirituelle. La tradition de l’Eglise est pourtant extrêmement riche sur ce point mais en dehors de quelques slogans sur la nécessité du chapelet quotidien, personne ne songe à y puiser les principes fondamentaux de la vie intérieure.