Le blog du Temps de l'Immaculée.
20/10/2025
L'anxiété monte en France. Face à la répétition des émeutes, à la fragmentation visible de la société et aux tensions quotidiennes, un terme revient avec une insistance croissante dans le débat public : "guerre civile". Cette crainte, autrefois cantonnée aux marges, exprime désormais une angoisse partagée par une large part de la population qui sent le sol se dérober sous ses pieds.
C'est dans ce contexte que la parole de Pierre Brochand, qui a dirigé les services de renseignement extérieur français (DGSE) de 2002 à 2008, prend une résonance particulière.
Recension d’un dossier d’Alexandre Devecchio du Figaro Magazine
Loin de rassurer ou de confirmer les craintes habituelles, son analyse, froide et méthodique, propose un diagnostic encore plus complexe, et peut-être plus inquiétant. Cet article distille les cinq points les plus surprenants et percutants de son intervention, qui bousculent les idées reçues sur l'avenir du pays.
1. Oubliez la "guerre civile", ce qui nous attend est une "confrontation interne"
Pour Pierre Brochand, le terme "guerre civile" est inadéquat pour décrire la situation. Il explique qu'une guerre civile, historiquement, oppose des factions "autochtones" pour le contrôle du pouvoir. Or, selon lui, le conflit qui se dessine en France est fondamentalement "importé".
Il soutient que la violence politique et sociale entre les citoyens "de souche" n'est plus une réalité. Pour ces derniers, les grands conflits idéologiques sont terminés, au sens où l'entendait le philosophe Francis Fukuyama : leurs différends se règlent désormais dans les urnes, sans basculer dans l'affrontement. Il préfère ainsi parler de "confrontation interne", une situation hybride où la géopolitique pèse autant que la politique, brouillant les lignes entre un conflit civil et une guerre étrangère, alimentée par la persistance des cultures d'origine à travers les générations.
Nos immigrés sont entrés avec de lourds bagages culturels, religieux, historiques, qu’ils n’ont pas abandonnés à la frontière.
2. Le vrai clivage : une France fracturée en quatre groupes distincts
L'analyse de Brochand met en lumière une société qui n'est plus unifiée, mais fragmentée en quatre blocs aux intérêts et aux perceptions radicalement différents. Cette division explique en grande partie l'incapacité du pays à formuler une réponse cohérente à la crise.
• "Ceux venus d’ailleurs" : Constituant 25 à 30% des résidents, ce groupe se décompose en trois strates. Une petite minorité (5-10%) est "assimilée". Une part plus importante (30-40%) est "intégrée", ce que Brochand qualifie de "CDD" : un respect de la loi en échange de l'emploi, mais chacun conserve sa culture. Le reste, soit la moitié, "flotte de la non-adhésion à la haine".
• "Ceux d'en haut" : Il s'agit d'une minorité vivant dans les métropoles, largement protégée des chocs culturels. C'est elle qui promeut et diffuse l'idéologie du "laissez passer, laissez tomber", considérant l'ouverture sans limites comme l'aboutissement de la civilisation.
• "Ceux d'en bas" : Formant la majorité silencieuse du pays (65-70%), ce groupe est directement et quotidiennement confronté aux conséquences de l'immigration de masse. Il exprime poliment son désaccord dans les urnes, mais son message n'est pas entendu par les élites.
• Les forces de l’ordre : Quatrième acteur, ce groupe détient le monopole de la violence légitime mais se trouve de plus en plus contraint. D'une part par des restrictions budgétaires qui le menacent de saturation, d'autre part et surtout par le cadre juridique de l'"État de droit", qui a supplanté l'ancien "État régalien" et limite sa capacité d'action.
Cette fragmentation profonde rend tout diagnostic commun et toute action concertée quasiment impossibles.
3. La démographie est l'accélérateur décisif hors de contrôle
Au cœur du raisonnement de Pierre Brochand se trouve un facteur qu'il juge implacable : la démographie. Il la qualifie d'"indicateur le plus fiable des temps futurs", car elle dessine une trajectoire lourde que les discours politiques ne peuvent masquer.
Le concept clé est celui du "chassé-croisé" démographique. Selon ses projections, ce mouvement, alimenté par une immigration de masse et des taux de natalité très différents, mènera inéluctablement à une "inversion de majorité, ethnique et religieuse" en France bien avant la fin du siècle. Ce changement n'est pas qu'une question de chiffres ; il entraîne une transformation qualitative de la société.
Brochand introduit ici la notion de "masse critique". Il explique qu'au-delà d'un certain seuil quantitatif, les mécanismes d'intégration, qui fonctionnaient pour des flux plus faibles et culturellement plus proches, cessent d'opérer. Dans les quartiers où ce seuil est dépassé, les caractéristiques des pays de départ (incivisme, intolérance, organisation clanique) se généralisent et remplacent la norme française. Pour lui, il est certain que ce "chamboulement annoncé par l'arithmétique ne peut se dérouler sans convulsions".
4. Notre calme apparent n'est qu'une illusion entretenue par des "sédatifs"
Si la confrontation n'a pas encore éclaté de manière généralisée, c'est parce que plusieurs "freins" maintiennent une paix sociale précaire. Brochand prévient cependant qu'il ne s'agit que d'"expédients temporaires visant à reculer pour mieux sauter".
• L'évitement : Le premier mécanisme est la ségrégation géographique. Chacun "vote avec ses pieds" pour éviter le contact : les "ceux d'en haut" se réfugient dans les centres-villes gentrifiés, les "ceux d'en bas" dans la France périphérique, et les "ceux d'ailleurs" se concentrent dans les banlieues.
• Les arrangements : À tous les niveaux, de l'État aux mairies, des "concessions unilatérales" sont faites pour acheter la paix sociale. Ces compromissions visent à calmer les tensions immédiates sans jamais traiter la racine du problème.
• La passivité des "natifs d'en bas" : Bien que majoritaires et mécontents, leur opposition s'exprime dans l'isoloir mais jamais dans la rue. Brochand identifie plusieurs "sédatifs" qui endorment leur capacité de réaction : la société de consommation, la manipulation par la peur (climat, épidémies) et la culpabilité (passé colonial), le divertissement de masse, et surtout le prix démesuré que l'individu accorde à sa propre vie biologique, le rendant incapable d'envisager le moindre risque physique.
5. L'État est volontairement impuissant face au chaos
Le point le plus contre-intuitif et peut-être le plus glaçant de l'analyse de Brochand concerne le rôle de l'État. Il soutient que l'État français n'est pas simplement dépassé, mais qu'il s'est volontairement rendu impuissant.
Le paradoxe central réside dans le passage d'un "État régalien", dont la mission était de défendre la nation et son peuple, à un "État de droit" moderne. Ce dernier, en se concentrant sur la protection absolue des droits fondamentaux de chaque individu — y compris, précise-t-il, les "étrangers et malfaisants" — a complètement désarmé la puissance publique. L'État ne peut plus défendre les droits collectifs du peuple français (sécurité, pérennité culturelle) car ils entreraient en conflit avec les droits individuels de ceux qui les menacent.
Sous la forme de l’État de droit, l’État régalien n’est plus que l’ombre de lui-même.
Cette situation mène à ce que Brochand nomme une "quadrature du cercle" : "une société qui se veut ouverte mais ne peut se perpétuer que fermée à ceux qui ne partagent pas sa xénophilie". Autrement dit, pour survivre, notre modèle devrait se protéger de ceux qui, profitant de son ouverture, refusent ses règles fondamentales. Mais le système juridique qu'il a lui-même mis en place le lui interdit.
Conclusion
Le tableau dressé par Pierre Brochand n'est pas celui d'une explosion soudaine, mais d'un processus quasi volcanique. Il décrit une dégradation lente et continue du tissu social, un magma de tensions souterraines qui s'accumulent et donnent lieu à des éruptions de violence de plus en plus fréquentes et intenses. Si rien ne change, la trajectoire semble inéluctable.
Sa mise en garde finale est sans appel. Si la France, par confort ou par aveuglement, persiste à céder au "biais de normalité" en croyant que les choses finiront par s'arranger d'elles-mêmes, alors "nous ne préparons pas à nos descendants des lendemains qui chantent".
Face à un diagnostic d'une telle sévérité, posé par un homme qui fut au cœur du pouvoir, une question demeure : comment continuer à ignorer les secousses qui annoncent le séisme ?