Le blog du Temps de l'Immaculée.

Prince Ghika, alias « sœur Vladimir »

15/05/2025

 Prince Ghika, alias « sœur Vladimir »

De confession orthodoxe, neveu du dernier prince de Moldavie et destiné à une carrière diplomatique, Vladimir Ghika embrasse la religion catholique alors qu’il n’a pas encore trente ans. Puis il renonce à la vie plaisante et aisée qu’il menait jusqu’alors à Paris pour s’occuper des pauvres gens et des malades. 

 Ordonné prêtre à cinquante ans, il évangélise les agnostiques qu’il côtoie dans son quartier populaire, mais soutient aussi les milieux intellectuels catholiques. Revenu en Roumanie et accusé d’espionnage pour le compte du Vatican en 1948, il est maltraité en prison, où il meurt d’épuisement en 1954.

 

Les raisons d'y croire


  • Dix princes de la famille Ghika ont régné sur la Moldavie et la Valachie depuis 1657. Grégoire V fut le dernier : c’était le propre grand-père de Vladimir. Toutefois, à Paris, bien que le prince Ghika côtoie la haute société, sa préférence va aux pauvres et aux malades. Il est catholique depuis 1902 et se dévoue tant aux côtés des Filles de la Charité qu’on le surnomme « sœur Vladimir ».

  • C’est au terme d’un cheminement spirituel que Vladimir a décidé d’adhérer à l’Église catholique romaine. Il a reçu les sacrements orthodoxes et a aussi fréquenté le culte protestant, mais, depuis l’époque du lycée, il se reconnaît « catholique d’esprit et de cœur » ; le catholicisme l’a séduit à la fois par sa beauté et sa bonté, et convaincu par la vérité de ses dogmes. Comme un moine orthodoxe lui demande plus tard pourquoi il s’est converti au catholicisme, il répond : « Pour devenir plus orthodoxe. »

 

  • Il est persuadé que la division entre les catholiques et les orthodoxes ne peut être résolue que par la reconnaissance de la primauté du pape. Il œuvre ainsi toute sa vie pour la réunion des orthodoxes à l’Église catholique romaine, qui appelle tous les chrétiens à la rejoindre.

  • Dans le dispensaire qu’il a fondé à Bucarest en 1906, le prince Ghika fait office de catéchiste auprès des âmes. Avant de commencer les visites quotidiennes, il formule cette prière : « Seigneur, je vais aller trouver un de ceux que vous appelez "d’autres vous-même". Faites que cet instant passé auprès de lui, en cherchant à lui faire du bien, porte pour lui comme pour moi des fruits de vie éternelle. »

 

  • En 1913, avec sœur Pucci, une Fille de la Charité, il organise une aide destinée aux victimes du choléra. Il les visite chez eux, au risque de contracter lui-même la maladie, et se met au service des plus pauvres. Il donne un jour de sa peau pour permettre une greffe au visage sur un accidenté au corps brûlé. Il pratique en un mot ce qu’il appelle « la liturgie du prochain » : rien ne rend Dieu proche comme le prochain. Toute souffrance d’un homme peut être réduite par la générosité surnaturelle des autres.

 

  • En 1924, à Auberive, dans une ancienne abbaye cistercienne du diocèse de Langres, l’abbé Ghika fonde une communauté de vie apostolique inspirée de saint Jean l’Évangéliste. Un jour, une bouillotte métallique remplie d’eau bouillante posée trop brutalement sur un marbre froid explose et brûle gravement au visage une jeune religieuse, sœur Marie-Louise Durant. Les chairs de son menton et de ses lèvres se décomposent. Le supérieur de la maison, l’abbé Ghika, prie longtemps auprès du lit où repose la religieuse blessée. Le lendemain, le médecin est stupéfait de constater que les tissus se sont raffermis et que les yeux peuvent s’ouvrir. Trois jours après, sœur Marie-Louise est complètement remise. Lorsqu’elle mourra, en 1975, on constatera que ses pommettes sont roses comme celles d’un enfant.

  • Le 18 novembre 1952, alors qu’il se rend à Bucarest au chevet d’un mourant, il est arrêté avec d’autres personnes, victimes comme lui de la persécution religieuse. Il est soumis à un interrogatoire sévère, subit un procès militaire truqué et est déclaré coupable d’espionnage pour le compte du Vatican. Il est condamné par le régime communiste à trois ans de prison pour haute trahison. La prison de Jilava, près de Bucarest, devient la dernière demeure terrestre du serviteur de Dieu. Épuisé par les souffrances et les mauvais traitements, il meurt le 16 mai 1954.

  • La prison ruisselle d’humidité et le froid de l’hiver fait grelotter les prisonniers. Il a quatre-vingts ans. Son grand âge ne lui a pas épargné les brimades morales et les tortures physiques : au cours d’interrogatoires nocturnes qui le privent de sommeil, il est insulté, maculé d’excréments, giflé et battu jusqu’au sang. On le laisse en sous-vêtements, sans linge de rechange.

  • Même dans ce lieu de punition, malgré les privations, les mauvais traitements et les tortures, il fait preuve d’une charité extraordinaire envers les détenus, qui se tournent vers lui pour obtenir un soutien spirituel, intellectuel et physique. Comme saint Paul sous les verrous, il professe encore avec douceur que « rien n’est plus honorable que d’être détenu pour la cause de Jésus-Christ ». Il se montre un témoin de la douceur évangélique et un modèle d’inflexibilité dans son affirmation de la foi au Christ.

 

Auteur : Docteur en philosophie, Vincent-Marie Thomas est prêtre.

 

Synthèse sur 1000 raisons de croire ici